C’est après avoir écouté une émission dans laquelle Jean-Louis Murat a donné le meilleur de lui-même (son venin est hilarant) que je me suis attaqué à l’écoute (certaines d’entre elles sont des combats qu’il faut mener) du triptyque proposé par Noam Bierstone. Et je me suis posé la question de savoir ce que l’auvergnat penserait et dirait à l’écoute de cette musique que nous qualifions de contemporaine ou de concrète, cela dépendra de son savoir en la matière, qu’il soit réel ou factice.

Percussionniste canadien, tout autant que performer habité, Noam Bierstone mélange des productions à base de percussion à une électronique brouilleuse de piste. Le mélange des deux matériaux n’entre pas dans un moule aux contours ciselé par avance. Le fruit de cette fusion donne de quoi alimenter notre imaginaire, combinant celui-ci avec les dessins de la pochette, qui ne sont pas sans nous rappeler les premiers travaux d’Antoon Krings. Nous en sommes à imaginer que des micros lilliputiens suivraient les faits et les gestes des escargots et autres poissons, donnant aux frottements que nous pensions silencieux, une consistance sonore qui pourrait nous faire croire à l’impossibilité du hasard. Sauf que terre-à-terre que nous sommes, abreuvés de mélodies et autres facilités d’écoute, nous lâchons les rênes, laissant le disque comme un habillage sonore. Et c’est là qu’il faut peut-être chercher la liaison avec « notre monde », c’est quand des bruits dans l’espace dans lequel nous écoutons le disque, se fondent naturellement avec la musique, que ce soit le frottement d’un couteau en plastique sur un set de table de la même matière le déplacement d’une chaise, le vent qui fait chanter les volets ou les gémissements canins d’un chien en plein rêve.

Alors je ne sais pas ce que Jean-Louis pense de ce disque, il ne l’écoutera certainement jamais, mais au même titre que ses disques habillent nos vies depuis des années, cette musique aura habillé un instant de la nôtre, provoquant la stupéfaction, des questions pour progressivement se fondre dans un moment formellement à part. Tectonique des sons.