« Magistralement glaçant, prodigieusement réconfortant ». The Sweet Wait, le premier album du duo formé par la chanteuse australienne Karen Vogt (Heligoland) et le multi-instrumentiste espagnol Pepo Galán, a ces derniers mois fait l’objet de remixes grandioses, préludes (au compte-gouttes) d’une révision complète sous la bannière All The Time In The World : en novembre 2022, relectures de Panacea I et Panacea II par Akira Rabelais, producteur multimédia et informaticien émérite ; au printemps dernier, c’est le natif de Ratisbonne Markus Guentner qui retouchait The Dark Opens The Way ; à la fin de l’été, le duo bristolien Alpha nous livrait un remix de Above The Aether, tandis que Madeleine Cocolas re-liftait Nothing Is Under Control. Les trois premiers étages de la fusée Galán / Vogt ayant été largués, l’heure est venue pour All The Time In The World - soit The Sweet Wait entièrement remixé -, de nous embarquer dans un périple sensoriel unique, avec aux manettes, outre les invités précédemment évoqués, la compositrice Hélène Vogelsinger, le groupe The Space Between Numbers, James S.Taylor (moitié de Swayzak) et Ada. Si trop souvent les albums remixés paraissent dispensables, d’autant plus que The Sweet Wait plaçait la barre très haut, All The Time In The World est, de par la pertinence des relectures proposées, une œuvre à part entière, faisant la part belle au chant éthéré et envoûtant de Karen Vogt : du sépulcral Above The Aether au lysergique Nothing Is Under Control, Galán / Vogt chasse sur les terres d’un spleen magistral, ambient et expérimental, de volutes synthétiques en motifs harmoniques, comme si l’on avait essoré le trip-hop, pour n’en garder que brume et mélancolie cotonneuse. Éloge de la beauté, la patiente beauté qui se révèle à ceux qui savent laisser à la beauté le temps de se révéler et de gagner, avec une lenteur paradoxalement immédiate, le cœur et les oreilles de l’auditeur. L’attente était douce, elle en valait la peine.