Tout le monde se connaît à Metz, petite ville qui fourmille d’autant plus de projets artistiques en tout genre. Avant on trompait l’ennui. Maintenant ce n’est plus tout à fait vrai, il semble qu’il y ait une nouvelle ferveur, enfin bon j’vais pas jouer les sociologues de comptoir. N’empêche que ces derniers temps, j’ai pas mal à chroniquer avec les disques du coin, et quels disques !
Aujourd’hui c’est au tour de AndWeShelter. L’album s’est composé en duo (Sébastien Boess et Magali Dhyvert). Pour la scène ils d’adjoignent le service de trois autres comparses (Rv Mel, David Rouby et Romain Laurent) dont je croise et croiserai souvent le chemin. Avec Sébastien Boess nous partageons le même local, j’ai chroniqué des disques où sa patte avait fait des merveilles (Stereostar Sixty Nine, le fabuleux Dog Bless You). Même qu’il sera aux commandes pour mon prochain skeud, un split avec Romain. Tu vois Metz c’est petit ! C’est donc musicalement que j’ai le plus appris à le connaître, auparavant avec son surprenant album sous le nom Kaliayev.
"19ends" sur lequel le duo a passé un sacré temps est un chef d’œuvre d’une beauté rare, délicat, recherché, travaillé sans jamais se noyer dans la virtuosité. C’est déjà beaucoup ! L’album est très complet avec douze titres comme autant d’atmosphères, de possibles évoqués. L’entrée de "Claudia Volta" offre ce genre d’invitation étrange, pleine de promesses. La voix chaude de Sébastien est contrebalancée par le timbre léger de Magali, réponse dans les fréquences qui nous permet une pure élévation. Le morceau évolue avec l’entrée d’une superbe ligne de piano rejointe par quelques guitares (dans lesquelles on reconnaîtra un certain amour pour le post-rock). Le tout évolue en intensité, en émotion avant d’être cadré et appuyé par un rythme électro. Dès ce premier morceau on aura donc compris que nous sommes face à un long processus de réflexion qui doit autant au style qu’à son essence : de magnifiques mélodies.
"The last race" part dans une dynamique différente, avec une certaine urgence que ce soit dans le rythme ou dans les arrangements. Quand les voix s’entrelacent c’est parfait (encore meilleur dans "Roller Coaster") ! L’esprit du titre me rappelle (notamment par moment le timbre chaud de Sébastien) les morceaux les plus inspirés de Aaron. Quand au superbe "Lucidy", cette fois-ci son timbre me rappelle un peu Damon Albarn, même si ce dernier ne bénéficie pas d’autant d’inspirations que AndWeShelter. Je suis sûr qu’il aurait bien aimé sortir un titre comme "Darkest Queen" ou encore l’entraînant "Out of control", parfaite rencontre entre esthétique électronique, mélodie, et énergie rock. Quand à "Nineteen ends", c’est une apothéose mélodique, une montée sans retour. Le rythme favorise d’ailleurs cet envol dans une danse circulaire. Le même tournis m’a pris pour la fin de "Asleep" avec ses couches successives.
Leur musique est judicieusement complexe et sereinement abordable. Et tous ces détails parsemés donneront l’envie de multiplier les écoutes à la recherche des trésors disséminés. D’ailleurs je manque de références pour vous les décrire, mais pas d’oreilles ou de sentiments pour les apprécier. Finalement, rock ou pop wave leur colle bien, plus pour les mystères qu’ils induisent que pour les lignes qu’ils indiquent. Cet ensemble contribue à faire de AndWeShelter un groupe à forte personnalité, une expérience qui prendra sûrement une ampleur encore autre sur scène.