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Interview réalisée par mail le 20 septembre 2005

Histoire de planter le décor peux-tu te présenter ?

— Je m’appelle Sébastien, j’ai 24 ans

Quelle est la genèse de fuck buddies, et de ce nom ?

— Au départ il y a The Nova Express, groupe dans lequel je chante et joue de la guitare, qui existe depuis 2002. Au printemps 2004 j’ai commencé à écrire des petites chansons rêches, on a essayé de les jouer en groupe mais je trouvais que ça ne convenait pas vraiment à l’orientation plutôt power pop que l’on prenait. Alors je les ai gardées sous le coude, ne sachant pas trop quoi en faire, jusqu’à ce que je joue trois chansons seul avec mon ami Vincent (de Director’s Cut) à la batterie, sous le nom de Fuck Buddies lors d’une soirée Dead Bees. J’avais ce nom en tête depuis un moment je trouvais que ça sonnait bien et j’étais étonné que personne ne l’ai utilisé avant. J’aime bien le coté cru, à coté de la plaque, et je trouvais ça pas mal de l’utiliser pour un projet solo crépusculaire plutôt que pour un énième projet electropunk.

Après un premier album aussi noir que torturé (j’ai souvent pensé aux travaux autistes de smog) tu es de retour avec un album plus apaisé et plus ouvert. Comment expliques-tu ce changement ?

— Merci pour la comparaison, Bill Callahan est un des mes artistes préférés. A Storm a été un effort quasi thérapeutique d’expulsion d’émotions, d’images, de souvenirs qui m’empêchaient d’aller de l’avant, un passage obligé avant un " mieux " nécessaire. J’avais besoin de sortir ce disque pour exorciser un certain nombre de choses qui m’étaient viscéralement insupportables, et une fois ce travail accompli, j’ai pu passer a autre chose. J’ai envisagé le disque de manière très naïve. La chanson du " mieux " est " Be Home for Christmas ", que j’ai écrite en Décembre 2004 et qui a été une vraie révélation pour moi.

Comment as-tu travaillé sur ce disque ?

— J’avais des morceaux écrits avant A Storm, qui n’avaient pas leur place dans celui-ci et qui ont pas mal changé, et des morceaux écrits après. L’enregistrement de Fuck Buddies in Slumberland en lui-même a été très rapide : " Be Home for Christmas " a servi de matrice au niveau des arrangements et du son et j’ai mis du piano sur tous les morceaux, souvent en improvisant des mélodies en une ou deux prises. " Will You Be Here For Me " et " Another Time Next Year " ont été écrites au fur et à mesure de la composition, en quelques heures. J’ai trouvé les rythmes, les parties de guitare, le chant, les paroles puis les parties de piano, dans l’ordre et assez rapidement. Je ne suis ni perfectionniste ni patient, en général soit ça marche du premier ou du deuxième coup, soit je mets le truc de coté.

Ta vie est-elle le ferment de ton inspiration ou as-tu recours à la littérature au cinéma, à l’imagination ?

— A Storm est très autobiographique, disons qu’il y a deux personnages centraux et l’un d’entre eux est moi. J’ai romancé, exagéré ou atténué certains éléments, mais à chaque fois le point de départ était un sentiment fort. In Slumberland est plus ouvert, sur tous les niveaux. Certains morceaux sont sur des personnes que je connais ou que j’ai connu, et puis il y a des chansons écrites sur le moment, sans arrière pensée ou base réelle. Je lis pas mal et je regarde beaucoup de trucs, je sais pas jusqu’à quel point ça m’influence mais ça peut me donner des idées, de nouveaux angles d’attaque pour la narration.

La satisfaction de ce nouvel opus, en plus de sa réussite, n’est-elle pas de t’ouvrir des horizons plus vastes que le claustrophobe premier album ?

— Merci. Disons que c’était ce qui était prévu dès le départ. Je ne voulais pas refaire A Storm, de toute façon je n’aurai pas pu le refaire de manière sincère. Je voulais ajouter de nouveaux éléments et arranger les morceaux pour leur donner une plus grande ampleur, j’ai utilisé les boucles et le piano pour mettre en perspective le contenu, pour l’alléger aussi.

L’autre satisfaction n’est-elle pas l’absence de référence évidente. A l’heure des étiquettes, c’est jouissif de ne pas être collé aux basques d’un artiste ?

— Oui, je trouve ça assez appréciable. J’écoute beaucoup de musique, il y a énormément de choses susceptibles de m’influencer et je suppose que c’est pour ça que mes chansons ne sonnent pas comme un artiste en particulier.

L’aridité qui semble s’éloigner était-elle la simple conséquence d’un manque de moyen, ou les pensées du moment étaient elles les raisons de cette rudesse ?

— Au départ c’était les deux. J’ai enregistré A Storm deux fois, la première avec un micro d’ordinateur très cheap, ça sonnait vraiment mal mais je n’y prêtais pas trop attention, je me disais que ce qui était important, c’était le fond. C’est Pierre (de Dead Bees) qui m’a conseillé de réenregistrer le disque, il m’a prêté un vieux quatre pistes à utiliser comme table de mixage en amont de l’ordinateur, et j’ai récupéré des micros. Dès le départ je savais que j’allais enregistrer ces chansons live, une prise, un micro, et les sortir comme ça. Les arrangements me faisaient assez peur et la limitation était surtout due à moi, je voulais sortir un premier disque complètement dénudé, avec rien qui ne puisse distraire l’auditeur du contenu. Je pense que c’était un bon point de départ. J’ai enregistré In Slumberland chez moi avec le même matériel.

Comment juges-tu les réactions à tes deux albums ? sont ils des lumières nouvelles pour toi, la découverte d’angle que tu ne pouvais imaginer ?

— C’est vraiment étonnant. Je suis touché quand je vois que quelqu’un a écouté et compris le disque et ça m’arrive d’avoir l’impression d’être en face d’un psychanalyste qui me sort des trucs énormes qui ne m’ont jamais traversé l’esprit.

Cette sortie de lit est elle définitive ? tu penses en avoir fini avec le repos obligatoire cloué par la douleur (rires) ?

— J’espère !

Toulouse n’est-il pas depuis une bonne dizaine d’années le lieu idéal pour être musicien. ? Des labels et artistes à profusion

— Pas vraiment. Toulouse est une toute petite ville, tout le monde se connaît, tout le monde est plus ou moins hypocrite… C’est pas plus lié à la ville qu’au milieu de la musique, qu’elle soit indépendante ou non. Il y a néanmoins deux ou trois lieux où l’on peut faire des petits concerts, des gens adorables, de bonnes initiatives (comme le FAM) et de très bons groupes. C’est une ville confortable, mais c’est pas le paradis.

tu vois comment le futur ? Tu as déjà en tête des évolutions ?

— Je vais continuer à sortir des disques. Il y a un ep qui sort dans les prochains jours, quatre chansons écrites sur une période de temps assez longue et dont je ne savais pas trop quoi faire, un morceau pop somnolent, deux morceaux acoustiques et une reprise assez barrée de " Peach Plum Pear " de Joanna Newsom. Après, j’ai enregistré 6 nouveaux morceaux pour le troisième album qui sortira l’an prochain, pour l’instant c’est sombre, il y a plein de rythmes et une reprise d’Arab Strap. J’aimerais aussi sortir un disque plus simple avec une amie qui joue très bien du piano, j’ai enregistré des démos, elle est en train de travailler dessus.

C’est envisageable de te voir chanter en français ?

— Pas pour l’instant en tout cas, c’est pas vraiment ma culture musicale. De toute façon Dominique A m’a complètement complexé.

Dans l’avenir proche des concerts sont en vue et si oui quel en sera le dispositif ?

— Je joue début novembre à la médiathèque associative de Toulouse et je vais essayer de me bouger et d’aller jouer ailleurs que dans le sud-ouest. Au niveau du dispositif c’est assez sommaire : guitare acoustique, chant et boucles.

le mot de la fin est pour toi

— Tigre