Interview réalisée par mail en septembre 2006.
Peux-tu expliquer ton parcours ? D’où viens-tu ?
— J’ai l’impression que mon parcours est un peu improbable. D’ailleurs je ne pense pas qu’il y ait eu de parcours. Juste une ligne d’arrivée franchie sans vraiment faire exprès..
Comment s’est passée la rencontre avec Travelling Music ?
— Un jour un type que je venais de rencontrer via un ami s’est mis à chanter ses propres chansons dans mon salon. C’est là que je me suis rendu compte qu’un être humain pouvait écrire des chansons, et pas seulement des stars qu’on voit à la télé. Ça m’a bien énervé et plutôt que de lui casser sa guitare sur la tête, je me suis dis que j’allais faire pareil (sans réfléchir que je ne savais ni jouer de la guitare ni chanter). Trois jours plus tard, je montre à ce même type ce que j’ai fait avec trois accords et des paroles écrites dans la foulée. Il m’a fait : " Continue ! On va faire un album..
Ce type c’est [Lemoine], qui commençait juste à créer Travelling Music avec Nicolas Cancel. Au départ on devait faire cet album en un week end, trois ans plus tard il sort enfin !
Quels sont les artistes qui t’ont influencé ?
— Je ne peux pas trop parler d’influences, j’ai surtout fait ce que j’ai pu, plutôt que ce que j’aurais voulu ! Je peux te citer [Lemoine], forcément. Et tout un tas qui ont continué à me donner envie d’écrire des chansons après avoir commencé : Will Oldham, Elliott smith, Françoiz Breut(+ DominiqueA), Daniel Johnston, Okkervil River, Julie Doiron, Herman Dune, Jeffrey Lewis, Jason Molina, etc. Tu vois le genre ! En gros c’est ce que j’écoutais dans la période où j’écrivais l’album.
Tu chantes surtout en français, c’est plutôt rare dans la faune indie actuelle… Tu revendiques une culture francophone ?
— Je ne revendique pas, mais j’ai de toute façon une culture francophone et quand j’écoutais des chansons en anglais, je me disais, oh la la si les paroles étaient en français, qu’est-ce que je prendrais dans la face ! Il y a donc une volonté d’écrire en français, sans poser de frontières : Un mot, on peut en jouer avec le sens et le son quelle qu’en soit l’origine. On peux voir la réunion de toutes les langues comme un seul langage, avec un tas de synonymes pour le même mot. C’est un des propos de " Yo tengo Just one heart " sur l’album, qui mélange allègrement anglais, français, espagnol, italien (l’histoire d’un marin en orbite autour de la planète qui ne se rappelle plus d’où il vient et en quelle langue il parle). Donc j’utilise des mots de langues étrangères comme des extensions du français. Mon anglais, mon espagnol, mon italien sont compréhensibles par tout le monde… c’est de la " lingua universal ".
Tu sors un album qui s’appelle " La suffocation du monde ". Sarcasme, détachement ou nihilisme ?
— Rien de tout ça, au contraire :
Le poème est le feu de l’homme Et c’est son chant le plus ancien Face à tout ce que la raison Ne pourra jamais éclairer Oh la suffocation du monde A l’apparition de la beauté.
Tes textes sont pour le moins décalés, ne sont-ils pas pour autant autobiographiques ?
— En fait … pas du tout. Je dirais même qu’ils seraient difficilement autobiographiques. La plupart des paroles sont clairement dans le monde de l’imaginaire (il me semble), tout en basculant facilement dans l’universel. S’ils étaient autobiographiques, j’aurai eu plus de mal à accepter de les diffuser.
Si je te dis qu’un titre comme " Jeanne Moreau Tokyo Live " m’évoque Katerine buvant un coup avec Bashung en écoutant un bon vieil album de Lou Barlow, çà te fait plaisir ou tu te sens insulté ?
— C’est parfait ! j’aurais pas dit mieux.
Je connais pas énormément ces trois là mais je vois à quoi ça ressemble (bashung un peu quand même, j’aime bien son album " pizza "). J’ai vu Lou Barlow en concert à Toulouse, c’était un sommet d’humanité partagé (il y a un super compte rendu de ce concert là : http://www.indietronica.com/article...). Quant à Katerine, je l’ai vu à la route du rock, où Travelling Music tient un stand, il a trouvé une bonne formule très efficace : acidulée, ludique, déconneuse. Mais malgré tout ça sent parfois un peu trop la " formule ", même si c’est une bonne formule.
Quelle est l’importance du live dans ta démarche artistique et comment çà se passe concrètement un concert de Hoepffner ?
— Ça se passe bien ! J’en ai fait deux jusqu’à maintenant (le prochain est prévu pour le 30 Octobre). Je joue avec [Lemoine] (encore lui !) qui m’accompagne avec différents instruments. Pour le dernier concert il y avait un batteur (Grégory Edelein) et une chanteuse (Laure Corbarieu) sur une chanson. Pour le prochain il devrait y avoir aussi du monde en plus. Le but c’est de se faire plaisir, sans préparer énormément, on garde de la fraîcheur dans l’interprétation. Evidemment je ne suis pas un guitar héros, mais vu que j’ai sept accords seulement à réussir dans le concert, je ne m’en sort pas trop mal.
Quant à la démarche artistique, l’objectif c’est de se faire plaisir, de partager ça avec des amis et avec le monde qui vient, de faire passer l’émotion des chansons. je bavarde, je raconte des trucs entre les chansons. J’ai un peu le trac, mais j’arrive à survivre.
Le livre, le disque et le film de chevet du moment ?
— Hmmm… En ce moment je travaille mes acquis. En fait je ne trouve pas le temps d’avancer dans " Nous avons mangé la forêt " de Condominas. J’écoute en boucle depuis hier " The letting go " de Will Oldham (il est sorti le même jour que mon album !) et ça fait un moment que j’ai pas vu un film.
Un dernier mot ?
— J’offre un album au premier qui m’offre un voilier acier de 9-12m…