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Le hasard est parfois heureux, la rencontre accidentelle toujours plus belle. L’absence de préméditation toujours plus attractive, plus aventureuse. Ne rien savoir d’un musicien, de son univers quand on découvre ses chansons peut être parfois tellement inconfortable mais aussi de temps en temps tellement riche en récompense reçue.

Comme je crois vous l’avoir déjà dit, il m’arrive de rencontrer un disque à la faveur d’un conseil, d’une errance sur le net, d’une pochette de disque remarquable ou très laide. Avec Gabriel Garzón-Montano et son album " Bishouné Alma del Huila" c’est d’abord ce nom exotique qui a éveillé mon attention, ce titre mystérieux, "Bishouné Alma del Huila". Ame d’huile, belle image qui en appelle d’autres chez moi. Corps de parfum, fragrances d’une peau à nue.

Aussi quand je lance l’écoute de cet EP, je ne m’attends pas à grand chose. Nul a priori négatif ni positif. Une neutralité, une fraîcheur d’écoute neuve. Je ne m’attends vraiment à rien.

La rythmique de "6-8" débute dans un claquement sec et doux à la fois puis vient cette voix androgyne qui n’est pas sans remémorer celle de de Justin Vernon. Mais ici, pas de maison en hiver au fond des bois ni de folk champêtre. Non ici, c’est une Soul lente sans mysticisme comme éteinte, une sensibilité fragile qui ranimera en vous l’envie d’écouter vos classiques, tel l’impeccable "What’s Going On" de vous savez qui.

Une Soul 2.0 à la fois froide, clinique et dépouilée. Sans artifices, minimale quand ne vient pas s’immiscer l’énergie de Curtis Mayfield subtilement dévié par James Blake ("Everything Is Eveything"). Et si nous osions le mot. Soul blanche... Quand on parle de Soul blanche on pense au Bowie de "Station To Station" ou de "Young Americans" et ce dernier souvent sous estimé par les adorateurs du Thin White Duke face à la trilogie berlinoise. Pourtant cet album, certes moins expérimentant reste d’une pertinence absolue et semble se prolonger encore aujourd’hui dans la musique de Gabriel Garzón-Montano ("Naeja") par ce climat fait de sécheresse et de chaleur.

Comme je fonctionne par analogie, quand on me parle de climat, je pense aux Nits qui avec une goutte construisent un univers. Des détails de "Giant Normal Dwarf" à l’épure de "Ting", combien d’histoires racontées. Gabriel est de cette école là, raconter l’inéluctable, l’indicible, la libération, l’abandon avec une économie de mots et d’effets ("Pour Maman").

Elle est belle cette école qui de Sean Nicholas Savage à James Blake perpétuent des envies Soul en la faisant encore grandir et en l’inscrivant dans son temps, notre temps morose ("Keep A Running"). Je suis toujours heureux d’entendre les chants des esclaves oubliés, le Doo-Wop des négligés, des parias et des inutiles ("Me Alone").

La musique, c’est d’abord une rencontre. Parfois, il y a les rendez-vous que l’on prend, les amis réguliers, parfois les rendez-vous qui nous attendent. Il n’y a pas de hasard, il est des rendez-vous, pas de coïncidences, juste des accidents, des accidents heureux.

www.gabrielgarzonmontano.com/




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