Montréal ma belle. Tu es un carrefour des musiques épiques, des épopées tout aussi solaires qu’ombrageuses. Tu ne sais pas te complaindre dans la facilité ou dans la médiocrité, tu génères des vocations, des désires d’en découdre avec les constructions même pharaoniques, avec le souci du détail d’un horloger Suisse. Tu es rattaché à un monde et on sent que tu essayes toujours de te rapprocher de celui d’en face. Tu enfantes donc des sortes de passerelles hétéroclites et chamarrées, des excroissances vivantes et sans aucune limite, sauf celles de l’évasion par la musique.

Plants and Animals est une de ces passerelles.

Après une arrivée fracassante en 2008 le groupe s’était peut être fracassé contre la difficulté d’enfanter une suite à ce qui ressemblait à un monolithe insurpassable par ce trio, comme si le début n’était pas la promesse d’un passé glorieux, mais la fin écrite en son sein.

Il aura donc fallu 8 ans au trio pour livrer un disque à la densité effrayante, un disque aux rondeurs frondeuses et belliqueuses, un disque qui avance les dents serrées, faisant cohabiter les échappées belles d’Arcade Fire dans le labyrinthe céphalique de Radiohead avec David Bowie comme étoile du berger pour s’y guider.

Comme l’indique la pochette, ce disque est une traversée dans le possible chaos de l’océan, mais aussi dans la possible paisible mer d’huile, admirant un horizon imaginaire, prenant la rotondité de la terre pour une ligne de fuite possible dans la construction mélodique. Le lyrisme n’est jamais loin, mais il n’est jamais trop démonstratif, même lui se faisant petit face à des éléments menaçants à chaque instant de se déchainer. Parfois très intimiste dans le propos, comme sur « No Worries Gonna Find Us » le disque se veut d’une ouverture sur l’autre qui est bien dans les gênes de ces Montréalais, qui font naitre de la friction entre deux mondes une œuvre magistrale. Grand disque épique.