Arrêtez tout. Ne comptez pas payer le crédit sur 25 ans que vous venez de souscrire, vous allez connaître des années de chômage, vous allez accumuler les jokers pour impayés, votre femme vous quittera, votre terrain sera impropre pour la consommation des légumes du jardin étant placé sur une ancienne décharge, et fin du fin vos murs vont se lézarder sous les coups de boutoir de « Hypnogogia » livraison musclée et mélodieuse de Steve Amber. Groupe français que nous pourrions rapprocher d’une fratrie qui tournerait autour de The Black Angels, Steve Amber est une claque monstrueuse (j’essaye de me faire embaucher chez Rock’n Folk, même si mon crédit maison lui est définitivement soldé.) comme il ne nous en arrive que trop rarement, le mur de son semblant ne plus avoir le droit de citer dans les officines sclérosées de la musique pas comme les autres (qu’est ce qu’une msuique pas comme les autres de nos jours ?). Mais ce disque, d’une maturité hallucinante, arrive dans la diversité (Entendre « And I’m Still Stuck in My Head » et se dire que tout n’est pas perdu ici), à ne jamais s’extraire d’une faune sonique qui emprunte à plus de style et d’ambiance que Roland Emmerich emprunte d’effets spéciaux pour faire avaler la pilule d’un de ses films. Sans être une ode à la guitare, celle-ci a un rôle prépondérant dans l’écriture de ces morceaux, tantôt jubilatoire (Empathy Drive), tantôt presque inquiétant (« ...Laughing... » que ne renierait pas Radiohead). Habillant le moindre interstice de silence, même par le murmure, le groupe n’occupe pourtant pas le terrain pour rien, nous projetant (dans le mur ?), nous happant, finissant par nous transformer en un Bugs Bunny les yeux éclatés dans les phares d’un hummer duquel sortira le son de « Hypnogogia ». Mélodique à en mourir sur toutes les chansons, il est un disque qui ne fait aucun crédit, mais nous offre presque 45 minutes sur le terrain que nous ne pensions plus constructible de la pop fureteuse. Énorme et beau.