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Le rock, au sens large du terme, c’est quoi d’autre que la capacité - face à un réel standardisé et ennuyeux à mourir - de faire un pas de côté ? Sauf que le réel, ce putain de réel qui pue la lose, MacThenardier saute dedans à pieds joints et, même si ça n’éclabousse que lui, on ne pourra s’empêcher de frémir tant la familiarité de ses constats désabusés ne nous épargne pas.

A travers l’énumération de tranches de vie – un apéro avec ses voisins de palier (« Quelques petites bières, du fromage et du pain »), sa vie sentimentale foireuse (« Dans mon assiette », un tube), les documentaires qu’il écoute à la radio le matin (« Le samedi en me réveillant »), ses vacances sexy à Strasbourg, - le one-man-solo-band lyonnais brosse un portrait en creux de la vacuité du quotidien dans tout ce qu’il a d’exceptionnel, dans un monde où tout un chacun dépensera pauvre argent et pauvre énergie à nous faire comprendre à quel point il est pauvrement unique.

Membre du collectif Entre Soi, le doctorant en mathématiques MacThenardier s’adresse à tous ceux qui ont une vie de merde (dont je fais partie) et distille depuis l’année dernière, en toute confidentialité sur sa page Bandcamp, un nombre impressionnant de EP tous plus recommandables que les autres et dont les titres sont autant de promesses drôlatiquement défaitistes : « Qu’est-ce qu’on a fait au bon Mac », « In the mood for Mac », « Toutes les jolies choses que t’es pour moi », « Pourquoi tu te mets dans ces états », j’en passe et des meilleurs.

Si le format est (volontairement ?) basique, binaire, lunaire, boîtes à rythmes cheap, basses arpégées et nappes de synthétiseurs crasseux, le chant de MacThenardier, excellent mélodiste, blasé mais taquin, vous capte direct et vous colle un spleen poisseux qui paradoxalement met de bonne humeur – on n’est pas seuls à se sentir au quotidien comme une merde. Il faut dire que le parti-pris métrique et syntaxique, ces phrases et ces bouts de phrases et ces mots répétés tels des mantras sociologiques, jusqu’à l’hypnose, la métempsychose, jamais d’overdose, est aussi osé (il a la flemme d’écrire des textes ?) qu’efficace (très proustien, s’appesantir sur les détails).

Énorme (énorme, énorme) coup de cœur pour la synthpop placide lucide languide, à la frontalité délicate, de MacThenardier, entomologiste avisé, qui – petit papillon sensible – s’épingle lui-même dans une collection de chansons essentielles ne parlant au fond que de ce que l’on sait déjà : vivre, c’est chiant, mais chanter le chiant, c’est cool.




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