Mon cher ami et confrère Jérôme Gillet de Froggy’s Delight, je ne suis pas complètement d’accord avec vous (Pour une fois et seulement une fois n’est pas coutume).
Mais chers amis lecteurs, vous prenez la discussion en cours, vous ne devez rien comprendre à cette apostrophe en forme de boutade respectueuse...
De quoi parlons-nous ? de qui ?
Je parle de notre Chabal musical, de notre barbu excentrique, de notre éternel mangeur de Pépitos bleus.
Si vous n’avez pas compris de qui nous parlons avec M. Gillet, alors il y a des chances pour que nous ne vivions pas dans la même sphère temporelle.
Il s’agit bien entendu de Sébastien Tellier et de son "Confection" fraîchement sorti. Cet album nous divise un peu M.Gillet et moi...
Pourtant, je peux le dire, je n’ai jusqu’à présent que peu goûté à l’univers musical du compositeur au système pileux que le monde entier nous envie.
La faute à quoi ?
La faute à trop de pose dans l’ironie et l’excentricité qui empêche l’empathie face au contenu, qui rend difficile la lisibilité de l’écriture...
Peut-être trop d’artifice et de calcul avec pourtant toujours ces impressions frustrantes de sentir un véritable univers derrière ces décors flamboyants et futiles.
Il y a aussi ce sentiment de condescendance moqueuse face à ses sujets et ses personnages qui nuisent à l’attachement profond.
Avec ses "Pepitos Bleus" à prendre au trente-cinquième degré, Sébastien Tellier annihilait toute forme d’émotion par une distanciation narquoise trop affirmée...
Autant dire que c’est avec prudence, pour ne pas dire du scepticisme que je rentrais dans ce fameux "Confection" à la pochette assez laide au demeurant.
Disons le tout net, ce dernier album est pour l’essentiel instrumental, hormis le single "L’Amour Naissant"...
"Confection" s’ouvre sur "Adieu" comme un hommage à Lucky Pierre (Aidan Moffat d’Arab Strap).
Bien sûr, Tellier ne se dépare pas de son humour mais ici point de distanciation trop résolue mais au contraire comme une addition à la fragilité de l’émotion.
On croit se promener dans les images de François Truffaut en compagnie de Georges Delerue acoquiné à Nino Rota comme sur "Adieu Mes Amours" qui joue avec nos frustrations...
"Hypnose" chasse sur les terres du Air de "Virgin Suicides".
C’est vrai, M. Gillet, on pourra allègrement passer l’insupportable, ridicule et inadaptée "Waltz".
Mais "Adieu comme un jeu" vous vrillera les sens à coup sûr.
"Delta Romantica" ressemble au choc de deux mondes, celui de Morricone et de Fabrizio De André avec ce lyrisme toujours sur le tranchant du rasoir du bon goût et du Kitsch.
"Confection" est construit comme la B.O d’un film avec ses variations comme ce "Curiosa" qui montre toute sa beauté dans ses arrangements de cordes dans sa seconde terminaison.
Parfois il suffit d’un titre pour légitimer l’achat d’un album... Ici, c’est "Le Delta Des Amours", soit un peu plus de deux minutes de Nirvana orchestral qui renvoie au tout meilleur d’Alexandre Desplat, de Nyman, de Glass, du Penguin Café Orchestra.
Alors, oui, M.Gillet, pour une fois et une fois seulement, je ne suis pas complètement d’accord avec vos opinions si souvent lumineuses tels des phares dans la nuit qui guident le marin perdu...
Peu amateur de Sébastien Tellier, clown condescendant et brechtien, ce "Confection" de haute couture m’a plus que convaincu que derrière les apparences d’excentrique barbu se cache un univers foisonnant et riche qui mérite une écoute sans distance...