Voilà un artiste aussi sincère qu’écorché debout. Poésie Rock, donc. Rock ? Assurément, mais sans démonstration. Car cet album semble provenir du caniveau des 80’s, un caniveau hier foulé par Thiéfaine, Darc ou Couture (déjà auteur, en 81, d’un Poèmes Rock). Autant-dire qu’ici, le rock s’exprime moins par la profusion électrique que par une mélancolie poisseuse, tabagique, terriblement romantique. Des clichés ? Jamais lorsque se perçoit l’expérience intime ou la confession format littéraire. Poésie ? Pas vraiment. Chez Ludovic Magoarou (ex La Folie Ordinaire), le propos est stylé mais limpide, loin du m’as-tu vu ou de l’embardée absconse.
Chansons revenues de la dèche, des excès alcooliques comme des amours foireux, Poésie Rock s’apparente à une chambre d’hôtel, rideaux fermés, le cendar rempli de mégots, la bouteille à moitié vide, une fille perdue qui harcèle les pensées. L’idée de fuite reste dominante, mais il s’agit bien de ruminer d’anciennes dérives pas très chastes, de plonger dans le passé pour en recueillir des confessions sales, urbaines, toxiques – avec immédiateté et honnêteté.
Comme une biture entre Paul Personne et Bukowski, Magoarou, dans ses mots, toise parfois le Bashung loubard de Play Blessure (« Court-circuit / Coincé dans l’ascenseur / Fonctionne plus le radiateur / Vas-y nies les calomnies / Je cherche l’interrupteur ») ou le Thiéfaine qui déraille (« Tu tournes dans ton paddock / Ah ça se prend pour un crack / T’attaques une banque et toc / T’es presque sur le tarmac »). Des mots asphaltes, un cuir pourri sur le dos, une lame rouillée dans la poche arrière. Essentiel.