Qu’est ce qu’un Haïku ? A 15 ans, j’aurais probablement répondu : “c’est un poème de fainéant.” Sans appel. A ma décharge, en plus d’être un jeune con, j’apprenais laborieusement la vie dans un système qui quantifie, mesure et pèse la qualité du travail. Alors forcément, si c’est court, c’est que l’auteur n’a rien à dire. J’ai eu quelques occasions de grandir depuis cette époque bénie. Et si j’ai pu m’élever, c’est aussi grâce à des Pascal Bouaziz, ces gens qui explorent, racontent, risquent. Pascal Bouaziz est de ces OVNIS qui hantent le rock et la chanson française, de ces ombres qui ouvrent des portes et passent au travers des murs, de ces noirs fantômes qui apportent la lumière même lorsqu’ils nous soufflent de dures vérités. Après Mendelson et Bruit noir, voilà qu’il sort son premier album. Le premier en solo...
Je ne voulais pas savoir avant d’écouter, je ne voulais pas avoir l’avis, le ressenti des autres avant de goûter moi-même. Et je ne le regrette pas. J’ai pu savourer chaque seconde comme un instant volé au temps, chaque mot comme une gourmandise unique qui m’aurait été réservée. Alors qui suis-je pour me permettre de vous gâcher le premier contact que vous ne tarderez pas à avoir avec ce très beau disque ? Voilà un dilemme qui m’agite régulièrement. Comment vous donner envie d’écouter un disque, d’être curieux, sans vous priver de l’effet de surprise ? Mais aujourd’hui, c’est encore plus dur, à la hauteur du disque dont il est question.
Ma chance, c’est que je n’écris pas ces lignes pour un grand journal à la diffusion nationale, mais pour un site de passionnés. J’ai donc envie de parier sur cette passion, celle qui anime tous les chroniqueurs d’A Découvrir Absolument, celle qui anime les artistes dont nous parlons, celle vous anime, chers lecteurs. C’est pourquoi je ne vous dirai rien du contre-pied, de la poésie moderne, de la richesse du propos, de la simple et évidente beauté de ce disque. Je vais parier sur votre curiosité et ne pas user des mots inutilement pour essayer de vous convaincre d’écouter “Haïkus”. De toute façon, vous avez déjà compris tout le bien que j’en pense. Mais s’il faut vous donner un coup de pouce, je préfère laisser les mots de Pascal Bouaziz vous raconter la nécessité de ce disque : “Cessez d’écrire, s’il vous plaît, je n’suis pas curieux de vous connaître.”