Soyons franc, sans la présence de Monsieur Dominique Ané, alias le grand Dominique A, il y avait autant de chance que je plonge dans ce disque qu’il y en avait que je me précipite sur le premier film d’Amélie Nothomb sur l’histoire d’amour entre un poulpe et une mangouste albinos pendant le débarquement en Normandie.

Combien de chemins de traverse aurais-je pu arpenter via les collaborations de l’homme de Remué, souvent pour des rencontres, certaines sans suite, d’autres avec au bout l’envie d’aller encore plus loin. Allez plus au cœur de l’œuvre de l’auteur de la Ronde de Nuit, c’est la proposition de Dominique Ané, ou plutôt celle de Jean-François Mondot. Pas question de jouer du ciseau dans les textes de Patrick Modiano, mais l’envie de s’inspirer des textes de l’écrivain, afin d’en tirer des chansons en « distillant le brouillard de Modiano ». Offert à Mister A afin qu’il les mette en musique, ceux-ci devenaient dés lors, une forme de vagabondage entre chien et loup, le ciel bas et le taux d’humidité rendant la vie impossible aux affiches collées à même les murs. Accompagné de Stéphane Oliva, de Sébastien Boisseau et de son inséparable Sacha Toorop à la batterie, Dominique se voit donc chanter les mots d’un autre, eux même l’émanation de l’œuvre d’un troisième, centre névralgique de ce Memento, Modiano. Dans un univers plus jazz, Dominique élargi sa palette sans s’éloigner trop de son champ (chant) de prédilection. On ne peut dissocier ce disque et sa possible traduction corporelle de son interprète, sous la même lumière que celle des Bouffes du Nord. Sur le fond de scène des images de Paris d’une déambulation parisienne, sous une nuit sans étoiles (Cela fonctionnerait à merveille sous les gouttes tombantes de Paris Sixties) l’œil de la caméra tentant de percer le mystère kaléidoscopique engendré par les gouttes d’eau sur le pare-brise. Memento, ce sont 18 propositions (interludes compris) Modianesque plongées dans un univers Anesque (Algues et Nénuphars comme la combinaison ultime des deux) qui définitivement sait nous promener loin de ses horizons.