Trois ans après le charmant EP Giant Heart (5 titres, 10 minutes, « si court qu’il vous laissera un goût intense de revenez-y »), le human beat boxer Ali Veejay, par ailleurs membre de 1=0, élargit son répertoire, avec un nouvel opus au visuel magnifique et dont l’intitulé sobre contraste avec la richesse des registres explorés : si la voix – d’onomatopées en mélodies avisées – reste l’outil privilégié du multi-instrumentiste saintais, les quatorze compositions de 2 s’infusent de post-rock (l’inaugural L’Énergie, basse lourde, beat lent, parlé chanté sur lit de syllabes sautillantes – un petit côté Diabologum), de postcore (Hypersensib, intense) et de hip hop organique tel qu’à une époque pratiqué par Programme (Chochotte – qui était également le titre originel de l’album : pas pour rien que le vague à l’âme en soit le sujet principal). Ali Veejay a gagné en frontalité, mais n’en oublie pas son amour pour le folk : ainsi, la très belle trilogie mid-tempo Magie / Feu / Mer, guitares lumineuses et harmonies délicates (l’on pense à Midlake), qui réchauffent (à la bougie) le cœur d’un disque tendre tout autant que piquant. Pêle-mêle, dans un tourbillon de hip-hop minimaliste – beat box et basse en avant –, les Curistes en prennent pour leur grade (Gothique), le sucre passe au tribunal (Sucre), les douches glacées fouettent le sang (Douche Glacée) : si spleen il y a, Ali Veejay n’en oublie pas la dérision, la salvatrice dérision qui parfois permet de franchir les obstacles intérieurs.