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Après le superbe dernier disque de Trisomie 21, l’autre grand retour en force est celui, sans nul doute, de "The Opposition", quoi que pour tout amateur de ces deux groupes, il n’y a jamais eu réellement d’arrêt, étrangement liés dans ma vie, ces deux nouveaux disques m’offrent un été féerique. Je me souviendrai toujours de cet automne de 1986, dans ce local de murs mal blanchis où s’étalaient des caisses et des caisses de vinyles, mon record shop des mercredis, le vendeur, enrobé, barbu, légèrement sale, connaissait a la perfection les gouts de tous ces ados qui venaient peupler les lieux a la sortie du lycée. Je lui dois mes premiers gros émois en dehors des sentiers communs, les découvertes d’autres sons, d’une autre manière de comprendre la musique. Je lui dois Ximox, The Sound, Marc Seberg, et puis ce disque étrange qui m’a interrogé durant des éternités sur la logique des émotions, cet "Empire days", disque de chevet, précieux, bizarre, pénétrant, comme une saoulerie magique, une dimension de plus aux sens. 22 ans plus tard ce vinyle vient souvent me montrer ses sillons où semer de nouvelles idées, pas une ride, pas un pli, et un futur encore vif. Obsessif, je tentais de retrouver tous les disques antérieurs, cet énorme "Breaking the silence" entre autre, et essaye encore de comprendre pourquoi ce groupe n’est pas plus présent dans les crânes mondiaux. J’avoue avoir fait un vide plus tard, je crois qu’après "Promise", mais plus parce que l’adolescence est une hystérie sensorielle, un Gargantua avide de milles sons a la fois, incapable de rester concentrer sur un seul projet. Je me rappelle être revenu sur eux de temps en temps, ce fatidique 2014 ou Marcus Bell, bassiste, s’éteignait, puis, chroniquement, a chaque mauvaise journée pour y puiser la lueur suffisante à retrouver le chemin. J’aimais et j’aime for ever ce projet qui n’en finit pas de projeter, ces esprits sans cesse torturé à trouver la couleur exacte de la beauté. Opposition ne fait pas de cadeaux, ce n’est pas un groupe qui vous caressera dans le sens des poils, c’est une entité jalouse de sa liberté, avide de recoins cachés, de mélodies cachées dans les ombres, de lueurs sous couvercles. Leur musique n’accepte aucune limite, question d’aller plus loin. "Somewhere in between" est un acte de présence, une preuve de vie farouche du groupe, un coup de poing sur la table, pour faire savoir qu’ils sont là, après tout, et faire regretter a beaucoup d’arriver trop tard a leur écoute. C’est un disque moins surprenant, peut être, mais aussi plus puissant, plus brut, trainant encore cette merveilleuse magie qu’ils ont de créer cet exotisme froid, cette ambiance de noces tristes. C’est un disque plus sage, mûr, munie de cette poésie anguleuse, dont les coins blessent par leurs réalités, leurs petites vies intimes, simples. Les paroles sont de petites fractures quotidiennes, exprimées comme des nectars, poésie brute du jour le jour, ils maintiennent ce gout pour les sons de profondeurs, presque échos, les mélodies immatérielles qui contrastent tant et si bien avec la voix de Mark Long. Ces nouvelles perles sont certes plus rageuses, plus terriennes, moins oniriques qu’avant, mais il reste la trace inégalable de ce groupe de surprendre d’un décalage sonore (Let it burn), d’une invention soudaine d’un détour sonore (Hold out your hands), d’une recherche unique des reflets de l’émotion, et les amants des premiers temps retrouveront ces profondeurs glauques mais chaleureuses des débuts, ces rythmes secs qui percent les peaux et sonorités ivres (At the window), et ces hymnes soudains (Somewhere in between), puissants comme incendies, ils découvriront cependant la nouveauté d’une voix qui a vécu ses lettres (the mess you made), d’une sagesse qui a donné le relief juste aux instruments pour paraitre plus intégré, plus autant séparés de la narration, une étape du groupe sur le chemin de l’infini, si agréable que la discothèque entière du groupe viendra vous chatouiller l’émotion. Opposition reste capable, trois décades plus tard, de créer, créer réellement, non pas copier-coller, sinon se lancer, trafiquer la réalité pour faire marcher l’art, de surprendre dans ces compositions atypiques, dont la base Post-punk ne sert qu’a épandre des innumérables styles, en inventant si besoin est, impossible de classifier, inégalable, et, comme d’habitude, malgré qu’il soit impossible de s’y habituer, d’une qualité sonore somptueuse.




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