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On ne me trompe pas, sur cela on ne me trompes pas, j’ai beau avoir avec l’âge des détours à chaque fois plus prononcés vers le rock pur et la folk onirique, ma route a commencé et c’est faite de câbles en câbles, c’est l’enfance qui nous moule , qui prépare le jerrican à remplir dans notre adolescence pour que notre maturité ait un sens, une carte routière de sentiments, une encyclopédie des haut-le-cœur. Il y a deux jours mon amie Pascale Le Berre, grande parmi les grandes postait sur un réseau ce fabuleux "In your room" de mes idolâtrés Depeche Mode, alors que j’écoutais Stevie Nicks " Edge of seventeen" le choc ne fut pas brutal, mais sous-cutanement, l’enfance demandait mémoire, je tissais en moi des écoutes possibles, un pull over d’électro pour l’hiver qui pointe. Les vinyles de DM, counterfeit, NIN, New Order, Front 242, T21, puis plus près, des abus de M83, les frères chimiques, Dorian en Espagne, God is an astronaut, Die form, Agar Agar, Ladytron, Grimes, Niños de Brasil, non, vous voyez, on ne me trompe pas, et j’y mêle ceux qui n’ont peut-être pas cette étiquette mais qui en savourent les fruits, alors quand je m’émeut sur un titre de cette division, je sais de l’envergure de cette sensation, je la calibre avec aucune marge d’erreur, je sais de quoi je frissonne, on ne me trompe pas. "Pretty is all you have" a le gabarit des inoubliables, You vicious ! A la mesure de la non fulgurance, de longue haleine, du moins, l’intérêt du succès à long trajet, après un Ep. de belle qualité, ils se lancent dans l’arène munis d’un disque spleen et somptueux, ample et intime, riche en sonorités nouées de plastique et d’organique, au teint du monde actuel, aux nuances des lendemains. Nos compères-lascars sont bien dotés, travail d’écolier, préparés à feux doux, bien mijotés, leur travail ne se fait pas sur une seule ligne électro, sinon sur toutes les lignes possibles, autant sur l’électron pur et dur que sur la tangente rock, dark ou dream, la panoplie complète du style, et le pire, c’est que ça touche à chacun des sujets au beau milieu de la cible. Aucune erreur, rien a jeter, aucune faiblesse. Parce que refaire, ready-made, recycler, réarranger, futuriser, enjoliver, déconstruire ou reconstruire sur les bases de l’électron des 70 et 80, n’est pas difficile, mais faire que le sentiment jouxte pleinement dans chaque chanson avec machines et guitares est une difficulté où plus d’un c’est brisé, les 90 en sont plein et les 00 en sortent à peine, encore sous léthargie, le vent souffle à nouveau dans la bonne direction, on revient pas, on retrouve le feu, la flamme, du moins, l’étincelle, le dernier T21 est une preuve, le premier You vicious ! est fondement. Nos deux créateurs (il est bon parfois de nommer les musiciens comme créateurs) Max Balquier et Bren Costaire, ex Frigo, jouent en toute finesse de leurs compositions pour déjouer les époques du style, dans un travail brillant parce que bien calculé, sans trop d’effet spéciaux ni pas assez d’étonnant, qui pénètre comme une intraveineuse nos diverses strates de sensations, a chaque titre son sujet, a chaque chanson sa cible, lors d’un tour de force qui tient de l’encyclopédie du genre. Un travail hautement serein, qui ne joue pas sur l’effet de surprise mais sur le prenant, l’envoutant, le duo rennais ne fait pas de l’électro a niveau industriel, sinon humain, bien que leurs machines servent de chair, leur œuvre est ossature, un disque intense, jouissif si l’âme ne si oppose, parce qu’il faut être libre de tout pour savourer ce bijou, il faut lâcher les amarres, clore les yeux, respirer profondément et écouter d’un seul coup, cul-sec, comme dans ces chefs d’œuvre des Dead can Dance, dans ces bouleversements secs, ces fractures de sons de Kraftwerk, ce disque riche en nuances, en paysages, tant écorché que blessant, tant noir que lumineux, tant recoin oublié que perte de vue, est un véritable petit plaisir d’écoute, qui passe comme une flèche de cupidon dans nos ouïes. J’ajoute a ces belles sensations reçues a l’écoute le nouveau travail esthétique et visuel de Jérôme Sevrette sur ce groupe, décidément, cet homme au grand talent a en plus, l’art du hasard, là où il pose l’objectif, nait un plaisir.




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