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Vanter les mérites de Ben Chasny, tête pensante de Six Organs of Admittance, s’apparente à un prêche en plein désert. On a effectivement la désagréable impression de parler à un mur tant les disques de l‘américain bénéficient d‘une attention minimale de la part de la critique musicale. Pourtant, cela fait bientôt une décennie que cet ermite, ancien guitariste de Plague lounge, déverse son folk neurasthénique sur des albums autant indispensables les uns que les autres (Compathia, Sun Awakens, School of the Flower, Dark Noontide…), tout en obéissant à une fréquence régulière et ce, au plus grand bonheur des auditeurs pointilleux qui forment la maigre frange du public fascinée par son registre. Un univers justement on ne peut plus singulier, désigné ici et là par les termes nébuleux mais pratiques de psychédélique ou d’expérimental. Disons pour être honnête que le folk pensé par Ben Chasny suit la ligne tracée plus tôt par Simon Finn et John Fahey et qu’il constitue l’antithèse des travaux (surestimés ?) de Devandra Banhart ou d’Antony and the Johnsons. Sur le fond, Shelter From The Ash ne provoquera pas de révolution mais aura au moins le mérite de confirmer le fidèle dans ses croyances. On retrouve Ben Chasny au sommet de sa forme, faisant toujours preuve d’une épatante agilité à manier et à torturer la guitare, dans les passages lancinants et lors d’échappées impromptues (Final Wing). Ouvert comme toujours aux sonorités orientales, l’album fait également une large place aux percussions, pour un résultat évoquant de tant à autres certains temps forts de Godspeed You Black Emperor (Shelter from the ash). A mille lieues de ses grasses productions lorsqu’il officie au sein des bruitistes Comets On Fire, Ben Chasny nous donne à voir une face plus lumineuse de lui-même. A nous d’en profiter.