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C’est avec un beau pied de nez que se termine « Paradigmes » troisième album de La Femme. « Tu t’en Lasses » (slow cybernétique dans les coursives d’un cabaret berlinois délocalisé au Pays Basque), est certes ici une histoire d’amour, mais n’est il pas notre caractère profond dans ce changement de société (de paradigme ?). Cette incapacité à inscrire nos envies nos désirs dans le temps, nous interrogeant même suite à un reportage sur un producteur d’enluminure depuis plus de quarante ans, alors que nous sommes incapables de projeter une activité sur plus d’un mois, sans être contrariés par l’ennui probable. Pied de nez par rapport à ce disque pantagruélique, ovni dans le paysage musical actuel qui par essence ne craint pas la lassitude tant il nous propose de styles différents, tellement le mot virage n’est pas même le bon terme, le groupe effectuant des tonneaux après chaque titre, ne s’inscrivant dans aucun style, ou plutôt dans tous les styles.

On passera sur l’anglais sommaire et volontairement scolaire qui donne aussi le charme période « à nous les petites Anglaises », on laissera les tenants d’une vindicte revendicatifs intellectuelles pour nous vautrer dans « Foutre le Bordel » dans un élan de spontanéité tout aussi animal qu’adolescente et on goûtera avec un rictus profond, le rocambolesque discours d’une méthode (Disconexion) qui n’est pas sans nous rappeler le discours de Poelvoorde sur l’urbanisme dans « c’est arrivé prés de chez vous ».

Mais « Paradigmes » est plus que cela, c’est une orgie pop, une énorme fête qui n’élude rien, même pas la mort avec un talent rare. (Nouvelle Orléans)

« Et si un jour, je retourne à Nouvelle-Orléans, tout est incertain

Je repasserai devant ma maison, je repenserai à maman

Maman, maintenant je suis grand et j’ai mes propres ailes

Si tu me voyais tu serais fier mais tu n’es plus avec moi sur cette Terre »

ou le départ comme un envol brisant les chaînes (« Va » et ses senteurs envoûtantes d’un rite de passage.). Ceux de La Femme avec le conformisme sont définitivement brisées. « Paradigmes » ne joue pas avec la mémoire, relatant les instants comme des moments de nos histoires (« Pasadena » ou comment fusionner Orelsan et Biolay en un), convoquant les souvenirs communs, comme les sonorités d’une culture commune (Lâcher de Chevaux). Pas un capharnaüm, « Paradigmes » est un disque.....ambitieux. Unique dans le paysage français actuel ou passé, une tentative réussie de changer de costume sans jamais changer son âme, s’interrogeant sur la vie.

« Pendant la nuit les paradigmes s’effacent

Les masques tombent pour célébrer le néant et la folie

Dans cette énigme qu’on appelle la vie

J’ai envie de courir et de pleurer »

Présentés comme des trublions, des histrions rigolards incapables de précision, La Femme sans changer de braquet (« Cool Colorado » comme un lien avec « Mystère »), mais en réussissant à captiver sur toute la longueur d’un album, s’installe tout en haut de la pop d’ici, et je suis persuadé d’une chose, cela nous permettra de vivre mieux, comme un changement de ce fameux paradigme. Énorme !




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