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L’amour change tout. Tu parles. Tu parles, tu parles trop, et moi j’ai un flingue mental. Je fais partie de ces gens qui, des décennies durant ayant pratiqué les relations sentimentales sous toutes leurs formes, n’y croient plus, tant je perçois la parade hypocoristique comme étant – au mieux – une idéologie nunuche destinée aux naïfs et – au pire – un infernal carcan, paralysant raison et bien-être. Bien entendu, je mets de côté l’attachement que l’on porte à ses enfants, qui relève de l’irrationnel et paradoxalement nous remet les pieds sur terre. L’amour inconditionnel existe, mais il ne concerne que nos hasardeuses progénitures : après tout, l’histoire nous le montre, même les criminels les plus endurcis continuent de bénéficier, envers et contre toutes raisons, de la sympathie de leurs parents (à ce sujet, lire le fabuleux L’Homme Sans Qualités de Robert Musil – les passages consacrés à Christian Moosbrugger). Alors certes, Warren Ellis n’est pas le fils putatif de Nick Cave, niveau look – barbe dégueulasse, maigreur ténébreuse –, il en a à revendre face au protéiforme gothique mille-pattes, ténébreux lover, barde apocalyptique, père brisé qu’est son confrère en noirceur, les deux hommes travaillant ensemble depuis le mal aimé The Boatman’s Call (1997 – naissance de Papy Nick, au détriment de Nick le Sauvage), mais il est indéniable que faire partie de la galaxie Bad Seeds – comme Mick Harvey, Blixa Bargeld ou Barry Adamson – apporte une street credibility indéniable. Toutes considérations initiales posées, Warren Ellis et ses compères (Jim White, Mick Turner), dans un monde parallèle privé du crooner au cœur brisé, disposeraient d’une existence tout à fait légitime, tant l’œuvre de Dirty Three – les albums Ocean Songs et Whatever You Love, You Are – déchire. Déchire à mort, je veux dire, et pour les avoir vus en concert dans les 2000s, je peux dire que ça reste un des meilleurs concerts de ma vie. Ainsi, c’est avec les meilleures intentions du monde que je me plonge dans Love Changes Everything – une décennie de silence, ça faisait beaucoup, non ? Allez, ne boudons pas notre plaisir : bah si, malheureusement. Le premier mouvement est une sorte de bordel noise improvisé qui rappelle (en moins bien) les foutoirs improvisés d’Electrelane (chaleur et rythmique enlevée, sans chaleur ni tension), ensuite on a le droit à des rythmiques décousues et du piano joué à deux doigts par un ersatz de Thom Yorke, bouillie ambient imbibée de soli de guitares électriques dégueulasses et de synthétiseurs à un euro, batterie foutage de gueule, roulements inutiles au son cheap, chœurs MIDI honteux [C’est là que je vérifie que je ne me suis pas trompé de disque, ça m’arrive régulièrement, hé hé], et le troisième mouvement ne nous épargnera rien de mieux (des accords piano plaqués ??? sur fond de batterie speed jazz, oh ho, original), c’est juste abominable, ça me rappelle moi à six ans qui remplissait des coloriages avec une seule couleur histoire que ma grand-mère me lâche mes neurones et m’offre en récompense un esquimau au chocolat. Au début, tu te voyais faire des sudoku avec ta tante super bien gaulée qui a dix ans de plus que toi et qui en cachette t’offre des clopes, mais tu te fais kidnapper par ton oncle fan de Magma, toujours un peu bourré et hautement spécialiste de tout ce qui part en couilles dans le monde (le système est contre nous, baby). Ah, zut, bon sang, le nouvel album de Dirty Three, ce sont les devoirs de vacances qui tournent mal.




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