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Je n’aime pas commencer une chronique par l’énumération de références ou un name dropping parfois stérile, ne faisant plaisir qu’à celui qui l’écrit mais dévaluant parfois l’artiste que j’aborde.

Pourtant, ici, je vais me contredire mais vous parler de Barbara, ce n’est pas seulement égrener une référence, c’est un peu vous parler de ma vie. Encore vous direz-vous ? Oui, encore...

C’est par l’intime que je rentre en connexion profonde avec les mots chantés de l’autre. Evidente réflexion, non ?

Barbara, je l’aime par tous mes sens. Et vous ? Cette grande dame tout en noir me faisait peur quand j’étais gamin. Je n’entendais rien au texte de "L’aigle noir" mais irrésistiblement je revenais à elle.

Je me rappelle encore de ma mère qui vient me réveiller , je me rappelle cette standing ovation dans cette rediffusion d’un concert à la télé sans doute à Pantin.

Aujourd’hui, j’ai grandi, vieilli. Elle n’est plus là mais finalement, comme toujours, comme les grands inusables, elle fait acte de transmission, elle continue à vivre par procuration, de Françoiz Breut à Barbara Carlotti.

Pauline Drand, j’avais repéré son nom à la faveur de l’écoute de quelques titres sur son Soundcloud. Une jeune femme en bascule sur les traces de l’enfance et les terrains vagues des doutes et des séparations.

Cette voix belle, sensuelle et grave retrouve les atonalités paradoxales de Juliette Greco ou de Françoiz Breut.

Pauline, tu nous présentes tes amies comme des doubles, Emilie et Marie. Emilie avec son noir bleu pour qui l’entend, son herbe verte évidemment . Marie, sœur de bois d’or ou d’émois .

Volontaire et fragile. Mutine et citadine, la musique de Pauline Drand se transporte autant du Pont Neuf que dans le lit des rivières avec ces chevaux qui paissent dans des prairies soyeuses.

Parfois, on aimerait habiter dans les mondes tenues, maitrisés et ponctuels d’une chanson, dans le "Funeral De Um Lavrador" de Chico Buarque, dans les mélodies de Sandy Denny, dans celles de Fairport Convention, dans le "Sings" de Patty Waters.

Pauline, elle, y vit déjà, avec ceux-là penchés au dessus de son épaule diaphane, avec ceux-là qui lui soufflent un peu de poudre douce qui unit harmonieusement l’électricité d’une Chan Marshall à la fausse quiétude bucolique de Lilac Time.

Chez Pauline, il y a ce petit quelque chose de l’ordre de la berceuse vaporeuse mais pas mièvre, ce "Des Faons Et Du Vent" avec ce rappel de Murray Head que je ne m’explique pas.

Econome et juste dans ses effets et dans ses mots, comme ce beau duo avec Tiago Saga ("Animal")

Pauline vole au dessus des cimes, nage dans des eaux troubles mais finit de nous laisser les bras ballants, cois, irradiés par la beauté des "jours de juillet".

Petite merveille des non-dits, des champs ensoleillés qui assèchent les sols des orages de la veille.

Petit merveille qui se refuse au rythme perpétuel des saisons, qui refuse le renoncement.

Ne voyez rien de sexiste ou machiste dans ces quelques mots à venir. Il y a les écritures féminines, les sensibiltés féminines qui nous donnent envie à nous, hommes pathétiques de vous protéger de votre fragilité, de vous éloigner du danger. Misérable piège dans lequel nous tombons à vos côtés.

Puis il y a les voix sans identité, les voix qui comblent nos craintes, les universelles réponses à nos pluies d’été, à nos mots d’amour pas fait pour rester.

"C’est un dimanche de mois de mai, c’est un dimanche de mois de mai, Comme il en existait

Il y a des fleurs au cerisier, Il y a des fleurs au cerisier,

Qui tombent à nos pieds

Alors on vit comme si jamais, alors on vit comme si jamais L’hiver ne venait Alors on rit comme si jamais, alors on rit comme si jamais, Les larmes ne coulaient

Et moi je t’aime comme si jamais, et moi je t’aime comme si jamais Elle ne pouvait exister, Celle qui viendra nous séparer, celle qui viendra nous séparer, Et puis vous partirez

Mais mon amour le mois de mai, mais mon amour le mois de mai, N’est pas fait pour durer Et puis tu sais, les mots d’amour, et puis tu sais, les mots d’amour, Ne sont pas dits pour rester

Alors on chante et puis l’on boit, alors on chante et puis l’on boit, Comme si jamais Alors on prie et puis l’on croit, alors on prie et puis l’on croit, Aux jours de juillet

Et les oiseaux savent mieux que nous, et les oiseaux savent mieux que nous Partir pour s’abriter Ils volent vers l’est et nous on reste, ils volent vers l’est et nous on reste Là, à se regarder

Et quand l’orage va arriver, et quand l’orage va arriver On sera un peu mouillés Mais c’est pas l’eau qui nous tuera, mais c’est pas l’eau qui nous tuera, Et ça on le sait

Et alors je m’allongerai, et alors je m’allongerai, Dans l’herbe pour me réchauffer,

À tes côtés évidemment, à tes côtés évidemment,

Et puis j’oublierai

Qu’il y a décembre et février, qu’il y a décembre et février

Et puis parfois janvier

Qu’il y a des cendres sous nos pieds, qu’il y a des cendres sous nos pieds,

De la pluie, en été

De la pluie, en été"




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