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Dernière ligne droite du festival et de notre report, donc. Cette fois, arrivés à l’heure et presque reposés, nous nous dirigeons illico vers la scène des remparts où The Districts attaquent : les 4 américains alternent les titres pop à d’autres plus enlevés & plus rock avec pour fil conducteur la voix mélodique du chanteur qui se donne sans compter. Le set est énergique, sans temps mort, et le public adhère visiblement à cette musique positive qui permet de débuter avec brio cette dernière journée. Groupe à suivre, assurément.

Quelques instants plus tard arrive Father John Misty sur la grande scène, accompagné de 5 musiciens : entre blues, rock et folk, les morceaux sont là surtout pour servir sa voix de crooner, dont on ne sait pas s’il surjoue constamment derrière ses lunettes de soleil (on cherche encore le soleil) ou si c’est simplement du second degré. Tour à tour, il se met à genoux, va dans le public toucher ses fans, joue avec la caméra, se roule à terre, fait tournoyer le micro, éclate d’un air cabotin une bulle de savon qui passe devant lui… Il semble cependant, d’après certains cris hystériques dans le public que ces gesticulations appuyées en laissent certain(e)s en pâmoison. Autant dire qu’on est moyennement convaincu, il n’a pas su faire vibrer notre âme de midinette.

Du coup, sans attendre la fin du concert, on se rapproche stratégiquement de la scène des remparts pour être en bonne position pour le groupe qu’on attend le plus cette soirée : les canadiens de Viet Cong. Les musiciens débarquent sur scène, chacun montrant ostensiblement une canette de bière portant une étoile rouge. "We are a band that plays music" lance le chanteur bassiste Matt Flegel, très pince-sans-rire, en guise d’introduction.

Le groupe, très à l’aise, et surpris de se voir en gros plan sur les 3 écrans qui font face à la petite scène, s’en amuse ouvertement, joue avec les caméras, demande à filmer le public plutôt qu’eux… Hormis les 2 premiers morceaux, ils jouent des titres de leur album éponyme dont Continental Shelf, le titre phare qui enflamme le public. On sent une grande connivence entre eux, le jeu des 2 guitaristes (l’un à la 12 cordes Hagström, l’autre à la Jazzmaster) est impressionnant dans la complémentarité, certains riffs étant joués alternativement, certains arpèges joués note à note par l’un et l’autre en parfaite synchronisation.

On regrette la voix très fatiguée (est-il enroué ?) de Matt qui altère un peu les mélodies vocales, mais l’énergie générale que développe le groupe nous permet de passer outre. Comme l’album, le set s’achève sur Death, le titre monument qui prend encore une autre dimension ici : après la 1e partie chantée, on assiste à une longue partie instrumentale qui finit par ralentir, lentement, répétitive, jusqu’à en devenir hypnotique, le batteur (portant un t-shirt de Girl Band) martelant sa cymbale tout en frappant le tom avec la main, encore, encore, puis le morceau reprend, rapide, jusqu’à une fin apocalyptique. Abasourdis, sonnés, c’est peu de dire que ce concert nous a plu.

Nous n’avons pas le temps de redescendre sur terre que les Savages attaquent sur la grande scène. On avait déjà eu l’occasion de les voir et leur prestation nous avait laissé sur notre faim, le moment est donc venu de nous faire une nouvelle opinion. Ce qui frappe d’emblée, c’est qu’on dirait les 4 musiciennes sorties d’un numéro de Vogue spécial noir et blanc.

Elles sont belles, elles le savent, elles en jouent. La batteuse danse derrière ses fûts, sa queue de cheval sautillant en cadence, la bassiste et la guitariste restant plus en retrait par rapport à la chanteuse et ses poses théâtralisées. Leur rock à tendance post-punk est plus froid que sauvage, heureusement contrebalancé par la voix chaude et profonde de Jehnny Beth.

Malgré tout, le public tarde à réagir vraiment, sans doute en partie à cause des titres inédits du nouvel album à venir, et ce n’est que vers la fin de leur concert avec les morceaux les plus connus que la sauce prend, sur l’insistance de Jehnny qui donne de sa personne, allant jusqu’à se jeter dans le public à 2 reprises durant Hit me et Husbands. La ferveur s’empare des festivaliers chauffés à blanc pour le dernier morceau Fuckers. On a préféré ce set à celui de Lyon, mais on reste malgré tout dubitatif sur la sincérité de cette musique.

Le temps d’un changement de plateau et les anglais de Ride font leur entrée sur scène. On ne risque pas de les confondre, le public de (vieux) fans scande leur nom et les 4 lettres s’affichent à la fois sur la grosse caisse et sur le fond de scène.

Ils attaquent par Leave them all behind - seul morceau qu’on reconnaîtra, n’étant pas du tout expert es-Ride – et on note déjà avec un plaisir non feint que le son peut être excellent sur la grande scène, on commençait à en douter vu les basses à outrance inutiles pour la plupart des autres groupes qui ont précédé les jours passés. Il est d’autant plus facile de rentrer dans le concert avec ce son qui met en valeur leur noisy-pop impeccable.

Sans être particulièrement fervent de leur style, on se laisse finalement emporter avec plaisir dès les premiers morceaux par les harmonies vocales des 2 chants très mélodiques de Mark Gardener et Andy Bell, les jeux de guitares – une débauche de guitares ! - saturées régulièrement agrémentés de wahwah, de trémolo… La paire basse batterie est efficace et donne une impression de facilité déconcertante, bref les morceaux déroulent et on en redemande. Finalement, ça nous donne envie de redécouvrir ce groupe qu’on a laissé de côté à l’époque.

Surprise ensuite, on s’attendait à un gus tout seul derrière ses machines, mais un batteur (dont l’énergie sera mise à rude épreuve) accompagne le bricoleur Dan Deacon : son électro intense et foutraque, agrémentée d’un chant avec moults effets dont vocoder & auto-tune fait remuer le fort de façon communicative.

Nous ferons finalement l’impasse sur les 2 derniers groupes The Juan MacLean et Jungle, la fatigue de ces 4 jours intensifs ayant raison de nous. Notre photographe, plus aguerri, nous ramène quelques superbes clichés de The Juan MacLean.

Ce festival - que l’on a connu plus modeste il y a quelques années - a pris son essor avec 2 scènes désormais idéalement disposées, un drainage du site nécessaire enfin réalisé et efficace, une zone restauration séparée et abritée. On a aussi apprécié l’espace dédié aux labels indés et les dédicaces d’artistes qu’on ne retrouve pas dans la plupart des festivals les plus gros.

Malgré la - désormais légendaire - défection de Björk, cette 25e édition fut une belle réussite à tout point de vue : une programmation variée et pleine de belles découvertes, une météo clémente, une organisation à la hauteur de l’événement.

De notre côté, en tant que reporters en herbe (il faut l’avouer), on s’est rendu compte qu’il n’était pas si simple de transmettre son ressenti au travers des mots, mais l’expérience fut enrichissante : merci à Gérald de nous en avoir donné l’occasion. Un grand merci également à Jérôme Sevrette à qui l’on doit les photos qui illustrent à merveille les 3 articles du festival au Fort St Père.

Enfin, nous espérons avoir réussi à partager avec vous l’ambiance générale du festival et des concerts auxquels on a assistés.

Fatigués, mais réjouis, la tête encore pleine de musiques.

Photos © Jérôme Sevrette




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