L’été est l’occasion de se remettre d’une année de labeur dans la frénésie parisienne, mais aussi de profiter d’un séjour dans les hauteurs (basses, mais hauteurs quand même) pour ressourcer son corps, et pour vider la liste des disques en retard, avant qu’Alix n’y jette son dévolu comme Alex lui pouvait vider les remises du Korova.
Disques laissés de côté souvent par manque de temps, ils deviennent pour certains d’entre eux la bande son des trois semaines loin des tourniquets, des appels stridents sur les quais. Don Idiot ne sera pas un de cela, enfin pas pour aménager les périples d’un lieu de randonnée à un autre, car quand il sera temps de faire une cheminée et demander à sa progéniture de regagner les contrées du marchand de sable, on sortira avec un plaisir ces chansons malades, croisement entre le Velvet Underground et Jean Luc le Ténia, histoire de nous mettre un bon spleen au milieu de cette félicité des congés payés (écouter Fleur Fânée et se prendre un shoot de mélancolie terrible).
Après Dream Loser (2017) et Don Idiot (2019), Pierre Donadio, photographe et musicien à ses heures, fait son retour avec Cent Détours, jouissant presque de ses déboires pour en faire, tel un alchimiste, des créations qui ne font rires que les tenants du conformismes, et trembler les habitués des cathédrales chétives et contrariées, construites en leurs temps par Daniel Johnston ou Will Odham, prenant plaisir, sans aucune dose de sadisme, du malheur de celui qui par ses chansons nous dit que sans elles il serait l’appat volontaire d’une corrida. Alors, oui, secrètement, je vais écouter ce disque quand la nuit tombera et que les jambes alourdies par la marche demanderont au corps entier de se reposer. Je vais l’écouter comme pour me soulager de mes affres personnelles, tellement plus vivables que celle de ces détours par centaine. Le romantisme trouve ici sa corde parfaite pour le grand saut.