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« Les sorties de secours n’existent qu’à l’intérieur des salles, et ne donnent que sur le pire des incendies, celui qui ne s’éteindra jamais ». Artiste rare (l’album précédent, Signac, date de 2018) et néanmoins prolifique (Jusqu’ici est son huitième opus), Signac œuvre dans une chanson française lettrée, d’Alain Bashung à Rodolphe Burger, qui avec talent – la langue est belle, imagée, poétique, parfois cinglante : saluons la qualité des textes écrits par Joël Rodde, compagnon de route des trois dernières décennies – refuse la facilité mélodique et les effets de manche chers à la variété hexagonale nourrie de mots creux. Ici, l’artisanat n’est pas exempt d’ambition esthétique, à l’instar de l’inaugural J’irai, guitare folk, piano, cordes et batterie martiale, western provincial d’une ampleur émouvante, qui rappelle les compositions cinématographiques de Tindersticks, où le noir et blanc côtoient le rouge sang. Épaulé aux arrangements par ses frères d’armes Christophe Jouanno (cheville ouvrière du dernier disque de Jeanne Morisseau, Les Battements d’Aile) et Eric Signor, Signac égrène avec une quiétude teintée d’amertume espérances déchues, constats douloureux, souvenirs de vies trop vécues, mal vécues, non vécues, vécues par d’autres, un autre malgré tout, certes rarement, optimiste, à l’image du refrain solaire de Aucun autre que soi, ballade lysergique paradoxalement réconfortante, ou du vénéneux Un peu de tout : « Ce n’est qu’un peu de tout / Mais nous serrons les poings ». Dans un passionnant entretien publié sur Buzz On Web, notre homme se livre, évoquant le sentiment de n’appartenir à aucune famille musicale, on ne le contredira pas, tant son œuvre s’inscrit loin des standards actuels (grosso modo : synthpop boulgour-moustache-bermuda jouée à deux doigts sur des claviers cheap), mais des auteurs, au sens noble du terme, forts d’un univers fort et surtout personnel, il en reste, Bertrand Betsch en tête, et – même si le temps passe (trop vite), que les tempes grisonnent et que la relève préfère faire joujou avec l’IA (pas grave, chaque civilisation n’est pas vouée à bâtir le Parthénon) – indéniablement Signac en fait partie. « À force de regarder / Tout ce qui se lézarde / À force de lézarder / Mais sans baisser la garde / J’ai trouvé des idées ».




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