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J’arrive tôt à la Malterie, scène alternative à la programmation aléatoire, pour une double affiche alléchante. Ce soir on souffle le chaud et le froid au 42 de rue Kuhlmann à Lille.

Entrez dans le cercle polaire.

Le froid d’abord, avec Lepolair, artiste de la région qui, assis dans un fauteuil vintage, arrive à créer sous les basses voûtes de la salle un ciel étoilé qu’on a l’habitude de contempler chez les Islandais de Mum ou Sigur Ros. Un homme, des machines et un public qui en ouvrant les yeux se demande encore où est passé le ciel. Un vrai moment de beauté partagé. Dans la salle, Ben Shepard et ses 5 partenaires rejoignent la scène et prennent place au sein d’une forêt d’instruments – j’en compte plus d’une quinzaine – qui donnent au groupe des airs de départ en vacances. On les sent contents d’être là, excités par le début d’une tournée de plus de 50 dates dans toute l’Europe. Première surprise pour ceux qui ne connaissent pas le groupe, Uzi & Ari n’est ni un duo, ni un one-man band comme Lepolair. Ils sont là, à 6, serrés sur une scène qui doit leur faire regretter les grands espaces de Salt Lake City.

Ben’s circus.

La mise en place est un peu hésitante en ce début de tournée mais très rapidement les premiers accords de Missoula retentissent devant un public attentif et qui très vite va se laisser emmener au fil de chansons tour à tour nerveuses ou ciselées où les musiciens changent jusqu’à 4 fois d’instruments au cours du même morceau. Je comprends mieux pourquoi ils m’ont parlé des concerts comme d’un show à la chorégraphie approximative. C’est un vrai cirque ! L’un délaisse la guitare jouée à l’archet, pour courir vers la batterie ou le clavier, avant de sauter sur le trombone ou l’accordéon, pendant qu’un autre réajuste les sangles, les jacks et les guitares…Ce que les chansons perdent en exactitude, elles le gagnent en sincérité.

Au moment d’entamer le prophétique ‘Asleep in armor’ Ben s’assommera presque avec le manche de sa guitare. Si on perçoit encore parfois des échos de la figure tutélaire et un peu écrasante de Thom Yorke dans quelques chansons (Wolf eggs bien sûr, Paper cuts avec en plus des cuivres très chaleureux), au fil du concert, d’autres groupes viennent en tête, on pense à Postal Service ou The Album leaf pour l’aspect précieux et précis des compositions et pour la richesse des compositions. Les chansons s’enchaînent, entrecoupée de tentatives pour raviver les vieux souvenirs de français et même d’espagnol…tout est bon pour communiquer. Une scène au même niveau que le public avec pour seule limite les claviers posés en travers…on sent l’envie de partage avec la centaine de personnes présentes. Les membres du groupe resteront longtemps après la fin du concert pour discuter autour d’une bière.

Enfin un groupe qui n’est pas avare de lui-même ! La set list est un savant mélange des 2 albums précédents (Mountain / molehill convaincant, Don’t black out et l’épique Perestroika où résonne the Cure et My bloody Valentine !) et du dernier dont on retiendra le banjo de ‘Thumbsucker’ et le très inspirés ‘Ghosts on the windowsill’. Le concert se terminera sur un solo, ‘young midwesterner’, où la sensibilité et la sincérité de Ben Shepard s’exprimeront avec chaleur, sans artifice.

Merci à La Malterie, Uzi & Ari et Valentin Sanchez d’Own Records.