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Il est parfois des coups de gueule salutaires. Ne voyez aucun chauvinisme mal placé,aucune mauvaise foi, aucun relent régionaliste mal digéré ici !!!

Y en marre des clichés sur la Bretagne ! La météo capricieuse ! L’autre empaffé de Prévert y est quand même pour beaucoup avec sa Barbara de mes deux...

Y en marre des clichés sur la Bretagne ! Ses crêpes avec ce touriste moyen qui n’est pas même foutu de distinguer une galette des Cotes d’Armor et d’Ille et Vilaine et la seule et authentique crêpe du Finistère que le monde entier (Mexicains compris) nous envie.

Y en marre des clichés sur la Bretagne ! Le même touriste moyen qui pense que tout visiteur de la Bretagne digne de ce nom se doit de porter ses bottes aigles, sa marinière et son ciré jaune pour mieux se fondre dans l’anonymat des autochtones locaux.

Y en marre des clichés sur la Bretagne ! L’Artichaut, Le Traou Mad, les "cuites" au Chouchen et à la Coreff, les lendemains de cuite au Breizh Cola.

Y en marre des clichés sur la Bretagne ! Marre de la fameuse phrase " Sans la pluie, la Bretagne ce serait pire que la Côte d’azur !!!!" Y en marre des clichés sur la Bretagne ! Marre de cette phrase là aussi : "En même temps, la Bretagne c’est plus beau sous la pluie."

Marre d’entendre dire de la Bretagne que nous sommes des péquenots arriérés, imbibés d’alcool comme des éponges sur le comptoir d’un bar et incultes...Ca, c’est plus la définition du Normand. Et puis en Normandie, il pleut tout le temps.

Bon, c’est vrai, il y a encore pire, il y a la Picardie où l’on ne trouve même pas un Perrier aprés 19h00, n’est-ce pas Geraldo ?

Mais bon, revenons en des terres plus civilisées...

En Bretagne, vous ne trouvez pas non plus des binious à tous les coins de rues avec un gugusse en tenue traditionnelle. On n’est pas tous des adeptes de l’école Diwan et on ne parle pas tous le breton en gardant un œil sur la prochaine bombe qu’on fera sauter en bons indépendantistes que nous sommes...

Oui, le trajet en TGV depuis Paris est interminable mais d’une part la Bretagne ça se mérite et d’autre part, on va pas tous les jours à la capitale. Oui, on est loin de tout... Oui à Brest mêm, par exemple, on ne passe pas nous voir, après c’est l’océan et un peu plus loin, c’est New York !

A Brest, on vient nous voir.

Oui, le jardin d’Eden a été fait à l’image de la Bretagne... Aussi après avoir rétabli certaines vérités, revenons à ce qui nous réunit habituellement, la Musique...

Marre aussi de ces avis définitifs : "En Bretagne, la Musique, c’est d’abord Rennes... Bon d’accord, il y a Miossec et Mathmatah de Brest...."

La musique ne vit pas et ne se crée pas qu’à Paris...

De régions improbables émergent des artistes singuliers, des auteurs avec un univers original et démarqué...

Avec Internet, la décentralisation numérique est en route...

La France est divisée en régions puis en départements... Moi je suis en région Bretagne et dans le département du Finistère et dans la morose ville de Brest...

Miossec ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt dans l’environnement musical de Brest et du Finistère en général... C’est une ville qui fourmille de beaux projets : Pour exemple et preuve :

Chapi Chapo et les petites musiques de pluie,Arnaud Le Goueflec,John Trap,Valier,La Boite à Ooti,Mon Automatique,Dollymatic et Ched Helias pour ne citer qu’eux...

Ched Helias, c’est un peu par hasard que je découvre sa musique...Catherine Watine, lors d’une discussion sur les réseaux sociaux, me parle d’un artiste de Quimper avec lequel elle travaille pour le remix d’un de ses titres, "Architect" pour l’album "Maison Watine".Je ne découvre donc pas directement le travail du monsieur par sa propre musique mais je remarque un apport d’une vraie dynamique dans ce titre réorchestré...

Ma curiosité me transporte immédiatement vers le site Bandcamp du quimperois où je découvre l’univers onirique et attachant de Ched Helias avec son premier album éponyme ou "The Ost Of my dreams"... J’échange quelques mots avec lui sur le Net....Les mois passent et je reçois au courrier l’EP "Technicolor Eyes".

Ched Helias, c’est un peu comme le mélange d’une certaine américanité et d’une celtitude... C’est une musique de grands espaces, de lyrisme assumé comme sur "Dig The Soil", grandiose morceau d’ouverture qui convoque les univers hantés de Sparklehorse...

"Dig The Soil" qui vous donne envie de vous allonger dans un pré, d’entendre les insectes qui assument leurs vies besogneuses, de sentir les parfums épars, de pour un instant faire un avec cet endroit, ce moment et cette sensation.

Il parvient à nous traduire ce que cherchent à nous dire les nuages, ce que le vent écrit sur l’horizon.

"Dig The Soil", c’est un peu comme des instantanés, des images de films imaginaires, comme des souvenirs flous de rêves qui continuent à laisser des traces dans nos journées... C’est une musique impressionniste.

D’ailleurs, Ched Helias cite souvent en référence, non pas des artistes mais plus des moments comme des ballades dans les Monts D’Arrée ou un moment de partage autour d’une table.

Cet Ep, c’est aussi une œuvre d’artisan, de quelqu’un qui revient mille 1000 fois sur l’ouvrage pour révéler chaque détail au mieux... Nous penserons parfois à Alexandre Varlet ou Bertrand Belin....

"Let’s lay down on the grass now

Let’s share the last piece of that cake you brought

Nearby the river

It makes my heart beat better

It fills my eyes with stars

Shooting and exploding

Bliss and rejoicing

Put your head on my belly

And we’ll both read on the clouds

What the wind is writing

On the horizon"

Avec "Technicolor Eyes", c’est comme la réunion improbable des Radar Brothers, le David Bowie des Seventies et la symbolique étrange de David Lynch. Ched Helias ne cherche pas à nous raconter des histoires, plus nous décrire des accidents émotionnels, des fils de tensions de l’instant, une urgence sereine.

"Injuries Of Past" calme les choses avec ce titre qui règle ses comptes avec les peurs qui ne veulent pas perdre leurs influences,qui ne veulent pas se dissoudre dans la rosée du petit matin, ces blessures du passé qui ne veulent pas s’assécher.... Les textes sont sombres, certes, mais jamais plombant et nous sentons cette volonté, cette envie de victoire sur le vide, cette envie de mise à distance comme une fenêtre ouverte aux quatre vents.

"I see you now" est une des pièces maîtresses de cet EP avec toujours ces moments au sortir du sommeil où la raison ne sait plus où se situent les frontières entre les climats ouatés et les lieux chargés de soleil. Ce genre d’instant surréaliste où nous nous rappelons de manière confuse d’un rêve sans trop savoir si il était heureux, confortable...

"n my half-remembered dream

I dig a grave for two

I shouldn’t be surprised

You’d come out of the blue"

Tout l’EP semble se construire autour du piano de Christel Vars, également à la tête d’un projet en solo. Pour preuve, "Fragile warrior" avec ses tonalités très Pop et sa spontanéité enthousiaste.

Les "Remixes’ qui finissent l’EP ne sont pas des morceaux de remplissage mais bien plus de véritables réappropriations comme la très atmosphérique version de "Fragile Warrior" par Arnaud Le Gouefflec décidément toujours dans les bons coups dans la musique de par chez moi... Si vous ne connaissez pas la Boite à Ooti par exemple, je ne peux que vous conseiller sa découverte.

Manu Borghi, ex-Magma, va faire "Technicolor Eyes" du côté d’un electro dub-step assez envoûtant quand Hello Bye Bye semble vouloir l’accoupler avec Kraftwerk ou Sleep Party People. Ce que l’on appelle une reconstruction complète, on ne garde que les murs porteurs et on réaménage tout l’ensemble.

Avec le remixed de "I See You Now" par le duo brestois Pastoral Division, nous pensons plus au Depeche Mode de Violator bien éloigné de la version originale.

Mention spéciale à la version de John Trap qui convoque les enfances hantées chères à Mark Linkous et à "Dig The Soil" retravaillé par Nicolas Leroux d’Overhead qui clôt ce "Technicolor Eyes" de belle facture....

Alors, quand l’envie vous prendra de dire qu’en Bretagne, nous les bretons, nous ne savons rien faire d’autre que de picoler, d’avoir des chapeaux ronds et de cultiver les choux-fleurs et les artichauts, vous vous y prendrez à deux fois et vous vous rappelerez cet article.

Quand l’envie vous prendra de dire qu’en Bretagne,la musique c’est Rennes et juste Rennes, ou alors Alan Stivell,Marc Seberg dans les années 80 et Miossec aujourd’hui, vous vous rappelerez que quelque part dans le Finistère sud, du côté de Quimper, un certain Ched Helias écrit des perles Pop à faire pleurer les statues....

www.chedhelias.bandcamp.com

www.christelvars.com

www.laboiteaooti.viinyl.com/

www.arnaudlegouefflec.com

www.chapimusic.free.fr/

www.johntrap29.wix.com/johntrap

www.valierexperience.free.fr

www.monautomatique.com/

www.fr.ulule.com/dolly-matic-/

www.watineprod.com/home/