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Tiens, tiens...ça frétille de nouveau du côté des fans d’Orouni ! Un nouvel album serait dans les bacs : Partitions est son nom. Et alors ? Alors, on écoute. Et là, blam ! Surprise ! Que dis-je ? CLAQUE DANS LA GUEULE !

Ce disque, leur quatrième en long format, est phénoménal, poétique, funambule et inspiré, maîtrisé de bout en bout avec cet art subtil du dépassement de fonction : éclater le format classique de la Pop-Song. Cette formule trop souvent respectée du "couplet-refrain", dont Rémi Antoni, tête pensante d’Orouni, déjoue avec une classe déconcertante et pas mal d’espiègleries aussi, tous les pièges, transformant ses choix de contraintes formelles quasi scientifiques (approche synesthésique des morceaux, schématisation chromatique des chansons...) et d’autres codes implicites (accords instables en soutien des mélodies notamment) en pure expressivité. Une sorte d’OuMuPo.

Si Orouni ne surgit pas de nulle part, leur dernier Lp donne pourtant l’impression de débouler comme ça d’un coup, même si leur Ep SomeWhere In Dreamland annoncé déjà la couleur (la chanteuse Emma Broughton y était déjà à l’ouvrage). Et , c’est le moins qu’on puisse dire, il surprend, séduit, enchante. Impossible d’y résister. Du talent, de la sensibilité, de l’âme, tout ça on s’y attendait. Mais cette technicité hallucinante au service des lignes mélodiques, ce sens des harmonies sophistiquées et foisonnantes à un tel niveau d’expérimentations tout en gardant cette facilité d’accès et de compréhension , que dire de plus ? CLAQUE DANS LA GUEULE !

Alors, bien sûr on s’extasie, on s’enflamme. c’est pas compliqué on est fan. On se laisserait aller à de la formule ampoulée, on croirait voir renaître du XX° siècle, les classieux Belle & Sebastian. Ouais, carrément. Ce genre de références serait d’ailleurs absolument assumé par l’ami Antoni. Mais, en fait, Orouni est devenu encore autre chose. Il faut écouter ad libitum ce disque miraculeux pour s’en rendre compte. L’écouter, c’est se mettre hors du temps, en suspension, hébété par des pop-songs mélancoliques et colorés, up-tempo et légères. C’est se retrouver partagé, "partitionné", entre l’envie de garder secret ou de diffuser partout une telle révélation. On a choisi notre camp !

Partitions. Ce titre résonne, en fin de compte, comme ce qu’il représente réellement : un manifeste. Rémi Antoni et sa clique l’égrènent, le mettent en oeuvre en conteurs malins, étirant le tempo, le retenant, inversant le cours des choses, les sons, les voix, le verbe comme pour mieux scénariser leurs histoires toutes en faux-rythme, en décalage perpétuel. Pour que surement, jamais rien ne se fige, que cette musique vive, évolue sans discontinuer sur disque comme sur scène, prenant son rythme propre à chaque écoute : loin des étiquettes et du maniérisme esthétisant pour le coup.

Un parti pris, et un pari, amplement réussi. Une démarche complexe qui finit par toucher à la grâce pure, fluide et tellement sensuelle. En toute simplicité, bravo Orouni, chapeau bas !