> Critiques > Autoproduits



Chez ADA, on suit le strasbourgeois Mathieu Le Digabel - dont l’alias Petseleh fait référence à une chanson de feu Elliott Smith, Pitseleh - depuis son premier album solo, paru en 2013. Vous pourrez écouter Song for J sur le volume 30 de nos compilations, visionner la Cosy Home Session enregistrée à l’occasion et même éplucher, titre par titre, commentaires de l’artiste à l’appui, une œuvre qui – vous l’aurez compris – nous aura particulièrement touchés. « Un petit disque immense », écrivions-nous, émus. Depuis, Petseleh a fait son bonhomme de chemin, avec la publication en 2017 d’un deuxième opus (The doubt and the revolution of reality) et l’intégration de musiciens – Philippe Bey (guitare, claviers), Rodolphe Weishaar (basse) et William Lamy (batterie) – lui permettant d’élargir sa palette sonore et de déployer sur scène une ampleur bienvenue. Derrière une pochette apaisante évoquant tout autant la nuit à venir (le soleil se couche) que les promesses qui s’ensuivent (pas forcément tenues, voire pire), Songs for Muriel s’ouvre sur un court instrumental planant (Dark was the horizon), avant de déployer ses ailes, avec le convaincant Like zombies in Korkula, pop shoegaze mélancolique rappelant feu Syd Matters, puis nous offrir un très catchy Ghosts and seasons, tout de guitares virevoltantes, entre riffs saturés et arpèges tournoyants, sur une suite d’accords sixties à souhait. Le chant clair et pur de Mathieu, sans maniérisme aucun se met au service de mélodies ourlées, qui restent en tête même lorsqu’elles se taisent et que les cristallines guitares folk prennent le relais puis lentement déclinent à l’horizon (A walk). Après un autre intermède, cette fois acoustique (Mila & Yuki on the balcony), Topsy turvy prend son temps, la guitare échevelée de Mathieu évoluant entre country et blues durant deux bonnes minutes afin de mieux surprendre l’auditeur – sur Songs for Muriel, les structures sont avantageusement aventureuses – lorsqu’enfin la voix pose des mots glaçants : « Maybe I’m wrong to think we’re lost / Maybe I’m wrong to wait for death ». Si l’atmosphère paraît quiète, Petseleh ne s’épargne pas une introspection qui contraste avec la luminosité des arrangements : les textes parlent d’amour, de l’amour qui s’éteint, de la mort, de la mort d’êtres aimés. Et au moment où l’on se dit, tout ciel bleu dehors, qu’une certaine noirceur sous-tend le nouvel album du Strasbourgeois, surgit le diptyque funky discoïde Before the fact / After the fact, la basse faisant le lien avec To the moon et sa fin soft psychédélique : Pink Floyd on the dancefloor ? Il y a du Roger Waters dans le jeu de guitare de la ballade Lady long hair, mais avec un Childfree au final aérien, Petseleh revient à sa prédilection folk épurée, avant d’attaquer toute distorsion dehors Song for M, puis de battre le rappel des troupes. En ce sens, Petseleh soufflant le chaud et le froid, voire les deux en même temps, livre un troisième album audacieux, à la production ciselée et bourré d’idées biscornues, empruntant des chemins de traverse sur lesquels nous le suivrons les yeux fermés. Chez Mathieu, l’obscurité se pare d’humanisme, alors si croche-pied il y a, nul doute qu’il saura, avant que nous touchions le sol, nous rattraper.




 autres albums


 interviews


 spéciales


aucune spéciale pour cet artiste.