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Vous souhaitez pimper le dernier banquet de l’année ? Invitez James Ford ! Toujours dans les bons coups (il est aux manettes du successful Romance des Fontaines D.C.), le producteur multifonction (Simian Mobile Disco, c’est lui) a jeté son dévolu sur le quintette londonien The Last Dinner Party, dont l’album inaugural à l’intitulé hédoniste, Prelude to Ecstasy, est sorti dans les bacs il y a quelques mois. Début de carrière météorique, chronique de rattrapage. À Hyde Park en juillet 2022, un an après avoir donné au The George son premier concert, le groupe formé sur les bancs de l’université ouvre pour rien de moins que les Rolling Stones. Ensuite, pour Abigail Morris (chant), Lizzie Mayland (chant, guitare, flûte), Emily Roberts (guitare, mandoline, flûte), Georgia Davies (basse) et Aurora Nishevci (claviers), c’est l’emballement. Le single Nothing Matters parcourt le monde et termine sur la bande son du jeu vidéo FC24 (consécration !!!), les festivals (dont Glastonbury) et les prestations télévisées remarquées s’enchaînent ; l’album sort enfin, c’est un carton, number one au Royaume-Uni et un Brit Awards dans les poches, celui de Rising Star, remporté au nez et à la barbe de… euh… tiktokeurs chantants. Mi-octobre, histoire d’enfoncer le clou, les filles publient une version remaniée de Prelude to Ecstasy, agrémentée de versions acoustiques et de reprises (Sparks, Kate Bush, Chris Isaak, Catherine Howe) : alors, énièmes plantes (vertes) produites dans les serres de l’industrie musicale british (souvent promptes à s’enflammer pour rien, business is business) ou, à l’instar des Wet Leg, alignement des planètes entre répertoire addictif et public avide d’identification ? S’ouvrant sur un instrumental théâtral et lyrique, Prelude To Ecstasy fait preuve d’une ambition crossover tout à fait étonnante, invoquant Kate Bush (Burn Alive) tout autant que la pop métronymique 80’s, au travers de compositions déstructurées (Caesar on a TV Screen, qui allègrement passe du binaire au ternaire et vice-versa, malin, il y a du Queen dans l’air), de vocalises affirmées (ah, les aigus de The Feminine Urge !!!) et de gimmicks oscillant entre glam rock et gothique : j’étais sceptique, je suis conquis, le tendre et vigoureux On Your Side emporte mon cœur. Il y a que je suis bon public dès lors que l’on y met les formes. La production sans effets de manche et les arrangements, riches mais savamment dosés, n’y sont pas pour rien : la mirifique Beautiful Boy ne serait-elle pas la chanson après laquelle courent en vain les Taylor, Lana et autres Redcar (je déconne, RIP) ? Quelle beauté, pfiou, et que dire au sujet de l’interlude planant Gjuha : chez The Last Dinner Party, tout le monde chante, forcément quand les timbres de voix harmonieusement s’accumulent, la nuque vibre. Moins convaincantes sur les tempos enlevés (Sinner), Abigail et ses comparses ne s’épargnent aucune gourmandise et sans complexes tendent vers l’opéra rock boursouflé (My Lady of Mercy, too much pour votre serviteur) mais surtout se permettent de glisser en fin d’album leur tube Nothing Matters – irrésistible (c’est quoi ce solo de guitare électrique ? Fun). Avant même d’écouter Prelude to Ecstasy, j’avais en tête Emily Dickinson et Jane Austen, je me voyais citer les sœurs Brontë ou Mary Shelley, ce genre de références faciles dès lors qu’il s’agit pour un chroniqueur mâle d’évoquer un girl band à l’apparence bariolée (remember le White Chalk de PJ Harvey), mais je dois admettre que, si certes grandiloquence il y a chez les Last Diner Party (l’apparence, la mise en scène, les références), elle s’accompagne d’une musicalité sans faille, le conclusif Mirror sonnant comme le miroir féminin d’une chanson de Fontaines D.C. : à se demander si James Ford n’est pas en 2024 devenu le bon génie de talents qui, bien entendu, le méritent. Well done.




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