Quand on me parle du rock des années 90, pour moi c’était comme si c’était hier ! Toute cette effervescence catalysée par le succès planétaire du grunge a posé tellement de bases essentielles à beaucoup de groupes, encore aujourd’hui, que je ne peux que m’offusquer lorsqu’un ado boutonneux qualifie tout ça de musique de vieux. Et pourtant, c’est lui qui a raison, Nevermind, Spiderland, Goo et Doolittle ont tous dépassé la trentaine, qu’on le veuille ou non. Malgré tout, ces références sont encore et toujours revendiquées par nombre de musiciens, qu’ils ont écoutées en boucle lorsqu’ils étaient eux-même des ados boutonneux.
Les 3 membres d’OREIL font clairement partie de ces ex-ados (boutonneux ?). De prime abord, leur musique, telle une madeleine, fait résonner en nous de vieux souvenirs, tant elle peut nous sembler familière. On reconnaît notamment les influences assumées de Sonic Youth bien sûr (dont ils reprennent souvent un titre en concert), mais aussi de Pavement, Dinosaur Jr ou de Codeine.
Pourtant, Oreil est loin du tribute band. Le trio Nantais a su se forger une identité propre, enrichissant cette base de pertinentes touches Krautrock et Post-Rock, étirant ses morceaux en longues plages instrumentales, tantôt planantes, souvent noisy (Trip’on the ocean et ses 9 minutes). Le chant quant-à lui alterne spoken scandé, ritournelles fragiles et refrains accrocheurs, Pascal s’appropriant parfois de sa voix grave les textes de Jack Kerouac, Charles Bukowski, Emily Jane Brontë ou Georges Orwell.
Avec ses compositions efficaces et inspirées, Sleep brings no joy to me, plus qu’un simple EP, ravira donc tous ceux qui, dans les années 90, alors ados (boutonneux ou pas), écoutaient Dirty à donf sur leur walkman en mode auto-reverse.