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Cela démarre comme une blitzkrieg pointilleuse, pour finir par nous délivrer un message simple et primordial ; La pop peut aussi se cacher sous la lave en fusion et la tectonique des plaques. Grand moment de ce premier album « Red Carpet » donne le ton à un disque aussi tendu qu’une arbalète, pouvant faire passer les Girls Against Boys ou Gang Of Four, pour des aimables officines proches du lexomil.

The Somnambulist est composé de Marco Bianciardi, Rafael Bord et Marcello S. Busato, alliage qui donne pour le coup à l’Europe sa raison d’être. Berlin devait être leur point de rencontre, convergence obligatoire de tous les mouvements, centre névralgique, ville où les énergies semblent prendre des sens. L’air semble être chargée de son histoire contemporaine, le bruit des bombes, puis le bruit du mur démantelé, la libération avant tout. Cette énergie le trio l’a concentrée dans des morceaux tout aussi sauvages que réfléchis, parvenant à créer une alchimie entre des guitares bouillantes et des cordes graves habituées aux charges épiques, mais peut être pas à celle de la décadence.

Le poumon principal, qui reste la batterie, souffle le chaud et le froid, donne bien plus que le tempo, et sur un titre comme « Don’t You Want To Devour This War ? » écrase avec simplicité toutes les chansons de Coldplay. Mais vous allez me dire le chroniqueur est une de fois de plus en train de perdre la tête, mais non, je vous confirme, car The Somnambulist sait se balader dans la lame d’un couteau aiguisé et le fer rouge d’un marteau qui continue à la peaufiner.

Brassant les styles, voir même les cultures (on perçoit des arpèges orientaux, comme plongés dans l’acide de Joy Division (Luce)) le trio sait aussi se faire lourd, presque inquiétant (Moda Borderline), voir carrément obsédant (80’s Violence) nous amenant comme dans une rame de métro allant s’écraser à la station Zoo. « 80’s Violence », est un morceau énorme introduisant le reste d’un disque, qui va nous plonger dans un Berlin en fusion, faisant rencontrer le temps de « Quinto Mistero Della Gioia » et « God Is Not A Good Shot » Brian Eno et Neu, Eno comme s’essayant à la métallurgie et aux ondes malsaines le temps de l’escapade, avant le plus berlinois des morceaux, le plus énorme aussi. « Alice Never » est comme sorti d’un ancien cabaret de Berlin Ouest, humide, aux dorures à l’histoire honteuse. En tournoyant autour d’un thème simple, le trio n’est pas sans nous rappeler Jim O’Rourke.

L’écurie de Amaury Cambuzat s’enrichit à chaque disque, mais là Acid Cobra Records nous propose un disque qui fera date dans l’histoire du label, car « Moda Borderline » s’impose d’écoute en écoute comme un lieu de pulsions créatives sans bornes. A écouter d’urgence les yeux fermés, le couteau aiguisé à portée de main.