1 Marianne Faithfull Give my love to London
Chaque année il y a cette lueur, cet espoir, chaque année un de ces colosses de l’histoire du rock, de la musique, vient pousser un coup de gueule magistral, vient rouvrir les yeux aux poulains, et nous rendent l’espoir perdu en 364 jours, oui, restent à venir de grandes choses. De ces retours naissent toujours des dévots prêts à être meilleurs encore. L’année dernière Bowie ramassait les cendres pour bâtir un nouvel arc de triomphe, encore Cohen, citez les vôtres (j’omets le nouveau Pink Floyd, pardon, mais il ne rentre pas dans ces cas là). Cette année, reposait son anglais brisé Marianne et reformait l’empire de ses sens accompagnée des troubadours obscurs, Marianne, la femme, la guerrière, l’infinie et éphémère de va-et-.vient, nous offre un recueil de photo où les visages ont des reliefs, cicatrices et lumières, autour de son divan colonial d’empire usé, les élus a la cour de madame ont composés des couleurs qui n’existaient pas encore, un livre de sons, entre biographie et biologie. Voila le son intime de cette année.
2 Sohn Tremors
Peut être pour le froid et gris de cette année ma mini sélection est ainsi, alignée a cette ligne de flottaison, sans couler, ni émerger. Mais cela m’a permis d’être plus sensible encore (si, c’est possible) et de trouver des frissons dans les icebergs même. Sohn a donné une profondeur de plus aux émotions, un cercle de plus a l’enfer, un anneau de plus aux amours, un disque fait d’éther et de chair, impressionnant de nuances et frissons, calme dans les airs, tranquille sous les océans, eternel dans les mémoires.
Il est vrai que les sonorités entre Asgeir et Sohn sont très ressemblantes, larges plages simples ciselées d’orfèvreries fines folks, mélange tout doux de naturel et de fabriqué, mais Asgeir a un plus qui s’appelle « Torrent », un hymne a la circulation sanguine, Asgeir ajoute cette pincée de poivre, cette épice qu’est la colère, a ces plaines nordiques, ce sang viking que soulage la lamentation d’amour, ce mélange ambigüe de plaisir et rage, Asgeir est une chair de poule d’hérisson, quand il s’émotionne, gare aux puas.
4 The War on drugs Lost in the dream
Il n’y a rien de neuf en eux, rien d’inventer, du Supertramp aérien, du folk creusant l’avenir, du Springsteen apaisé, une manière de chanter entre Tom Petty et mon cher Stephan Eischer, mais voila, cela me fait le même effet que le « August and everything after » des Counting crows, un disque entièrement génial sans avoir aucune grandesse, un disque dont aucune chanson ne manque, un objet compact, parfait, impossible d’améliorer, complet, sons exquis, étude terrible de chaque atmosphère, travail de studio de fourmis, mélodies somptueuses, instruments intelligents, tout bien léché, ce disque typique qu’on ressort chaque trois ou quatre mois parce qu’il nous manque, sans être le meilleur disque du monde, c’est celui dont on a toujours besoin, planant, perçant, zen et paix, easy listening pour millier d’années.
Je ne cacherai pas que je connais (sans plus, mais avec envie de causer longtemps avec elle) Nathalie, musicienne talentueuse aux ordres de quelques grands maitres de la scène françaises (surtout certains de bon gouts), notre rêveuse et voyageuse d’entre dimensions a un art incrusté comme diamants dans les ouïes, la voix et les doigts, capable de poser un léger rayon de lumière sur des mélodies en clair-obscur. Je ne cache pas que je la « connais » (du moins une dimension d’elle), mais je ne la citerai pas dans une liste si injustement courte si son disque ne valait pas la peine. Ces ritournelles, imprégnées de Bjork, de Lykke li (courrez voir sa version en concert de « I follow rivers »c’est magique), fille de guerrières comme Kate Bush et sœur de Soley ou Zola Jesus, d’Anne Brun ou Iamamiwhoiam, savourant dans son travail chaque instrument dans sa naturelle sonorité, les idées claires de ses passions, avec un pied sur terre et l’autre partout ailleurs, un œil sur nous et un œil sur les autres mondes. Pour vous traduire son effet, j’ai depuis la première écoute un manège de chevaux de bois qui tourne sans cesse dans mon crâne, avec ses lumières clignotantes, sa mélodie envoutante, son « imaginerie », l’incessant plaisir.
A rajouté dans le coffre aux trésors de cette année :
6 Wovenhand Refractory obdurate : La cruauté profonde des blessures, nerfs et chairs
7 Warpaint Warpaint : Pour mes heures en veilleuse
8 Sivert Hoyem Endless love : dans le Cœur des ténèbres
9 Cloud boat Model of you : voler est facile
10 K ! Entre les jambes : Le déjà-vu et revu et corrigé, coquine et assassine
11 Aube L Time for the happiness : la dernière grande découverte de cette année, intriguant
12 Strand of oaks Heal- Au-delà des organes
13 Reza Tornado : l’avenir dira, mais ritournelles pénétrantes
14 People of nothing People of nothing : L’électro-humain
15 Afghan Whigs Do to the beast : cru à souhait, pour nuits sauvages