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Ceci n’est pas un disque, c’est une plongée dans l’acide dans une fête foraine, la barbe à papa comme appât, la sidération comme première manifestation émotive. Ceci n’est pas une suite de chansons, c’est une licence poétique au papier de verre, le paroxysme de la punchline mise au service d’une musique aussi squelettique ou famélique. Cousinage avec la nudité mordante de Noir Boy George, maquillage comme un Visage qui changerait le gris en noir, car on ne rigole jamais ici, même la mélancolie est au placard (hormis sur le vibrant « Nous Avons Joué tous les deux » qu’il est impossible d’écouter sans la proximité d’un mouchoir au pouvoir absorbant absolue).

C’est un inceste dans un citron à l’acidité quasi-insoutenable, car il se couple avec du sucre sur la paille, nous donnant envie de danser sur une phrase comme " je préfère t’embêter plutôt que t’enculer " sur "Petite Princesse". Alors que sur la superbe pochette elle nous tient en joue, tout au long du disque, ce qui nous propose la mort, c’est le malaise de bouger, se sentir bien au milieu d’un chaos orchestré par une voix qui n’est pas sans nous rappeler la diction de Françoise Lebrun de "La Maman et la Putain", mais là où l’héroïne du film avait la tristesse comme ponctuation, chez Poupard il y a une rage froide, faisant lecture de ses fulgurances poétiques (« je t’aime pas tant » d’une beauté fracassante, « Calcul le temps qu’il faudrait pour supprimer cet aspect de toi » comme une maxime à se tatouer.) avec la même douceur froide déclamant des phrases de nos amours animals qui normalement ne se disent pas.

Il y a un basculement car c’est une voix féminine qui porte certaines pensées masculines, c’est une femme qui glace nos fraises, qui pousse à la gêne, évitant les géniardides du coupable repentissent face à une caméra façon Dardenne, pour que le choc frontal soit total quitte à faire de ce disque très dansant (chez Poupard il faut danser, même sur la mort des illusions) un combat sans fin, mais toujours avec le maitre mot de la poésie.

Poupard ne rigole pas. Le duo par contre joue de la séduction de façon évidente et mordante, ne se cachant pas quand on l’attend pour mieux nous prendre par surprise, et c’est toute la beauté de ce disque monumental dans tout ce qu’il porte en lui. En vingt-cinq minutes il nous terrasse, inquiétant nos possibles contradictions, dérangeant nos à priori probables, nous subjuguant par sa radicalité.

Il est impossible de passer à côté de Poupard, il est la clé de notre propre enfermement, une violence pour nos certitudes, une boule de bowling dans nos incertitudes en miettes, il est le disque que nous n’aurions jamais dû écouter pour notre tranquillité, mais il est apparu, et l’inquiétude qu’il nous procure est comparable à une poésie guerrière mais libératrice. Attention à ce que vous allez écouter et entendre, c’est un trés grand et beau disque malade.




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